Affaire de l'étrangleur de BostonL'étrangleur de Boston est le surnom donné au meurtrier de 13 femmes dans la région de Boston, au Massachusetts, au début des années 1960. Les crimes sont attribués à Albert DeSalvo à la suite de ses aveux, ainsi qu'à des détails issus d'une autre affaire[1] et des preuves ADN le liant à la dernière victime. À la suite de la condamnation de DeSalvo – avant la reconnaissance de la preuve ADN -, plusieurs parties enquêtant sur les affaires ont fait l'hypothèse que les meurtres (parfois appelés « meurtres au bas de soie ») avaient été commis par plus d'une personne. NomsAu début de l'enquête, les crimes sont attribués à un tueur en série inconnu surnommé « L'Étrangleur Fou de Boston » (« The Mad Strangler of Boston »)[2]. Le 8 juillet 1962, le Sunday Herald publie un article intitulé « Un étrangleur fou tue quatre femmes à Boston »[3]. Le tueur était également connu sous le nom du « Fantôme Démon » (« Phantom Fiend »)[4] et de « L'Étrangleur Fantôme » (« Phantom Strangler »), en raison de sa capacité à faire en sorte que les femmes l'autorisent à pénétrer dans leurs appartements. En 1963, deux journalistes d'investigation pour le Record American, Jean Cole et Loretta McLaughlin, écrivent une série en quatre parties sur le tueur, le surnommant « L'Étrangleur de Boston » (« The Boston Strangler »)[5],[6]. Au moment où les aveux de DeSalvo sont diffusés en audience publique, le surnom de « L'Étrangleur de Boston » est alors rentré dans les usages. ÉvénementsEntre le 14 juin 1962 et le 4 janvier 1964, 13 femmes célibataires âgées de 19 à 85 ans sont assassinées dans la région de Boston. La plupart sont agressées sexuellement et étranglées dans leurs appartements. Du fait du caractère érotomane, la police dresse l'hypothèse d'un agresseur masculin. En l'absence de signes d'effractions dans les habitations, il est supposé que les femmes avaient volontairement laissé leur agresseur entrer, soit parce qu'elles le connaissaient, soit parce qu'elles pensaient qu'il s'agissait d'un agent de service (ménage, livraison, etc.). En dépit d'une large couverture médiatique dès les premiers meurtres, les attaques se poursuivent. De nombreux résidents s'équipent de gaz lacrymogènes et de nouvelles serrures[2]. Certaines femmes quittent la région[7][2]. Les meurtres ont eu lieu dans plusieurs villes, dont Boston, compliquant le suivi et la coordination des enquêtes en fonction des différentes juridictions. Le procureur général du Massachusetts, Edward W. Brooke, a supervisé la coordination des différentes forces de police[2][8]. Il a permis au parapsychologue Peter Hurkos d'utiliser sa perception extrasensorielle alléguée pour analyser les cas, pour lesquels Hurkos a prétendu qu'une seule personne était responsable. Cette décision a soulevé une controverse[2]. Selon certains, Hurkos a fourni une « description minutieusement détaillée de la mauvaise personne », et la presse ridiculise la décision de Brooke[8]. Alors qu'une grande partie du public est convaincue que tous les meurtres sont le fait d'une seule personne, la police maintient également l'hypothèse de tueurs multiples. Des liens apparents entre la majorité des victimes et des hôpitaux sont également sujets de débats[2]. Victimes
Le meurtre de Margaret Davis, âgée de 60 ans, de la ville de Roxbury, ainsi que celui de Cheryl Laird, âgée de 14 ans, de la ville de Lawrence, sont initialement attribués à l'étrangleur de Boston, mais se sont avérés plus tard sans rapport[10],[11]. Aveux de DeSalvoLe 27 octobre 1964, un inconnu pénètre dans le domicile d'une jeune femme en se faisant passer pour un détective. Après l'avoir agressée sexuellement, l'assassin part dans la précipitation en s'excusant. La description faite par la femme de son agresseur permet à la police d'identifier DeSalvo comme suspect. Lorsque sa photo est publiée, de nombreuses femmes l'identifient comme l'homme les ayant agressées. Plus tôt dans la même journée du 27 octobre, DeSalvo s'était fait passer pour un automobiliste ayant des problèmes de voiture et avait tenté de pénétrer dans une maison à Bridgewater, dans le Massachusetts. Le propriétaire, le futur chef de la police de Brockton, Richard Sproules, devenu méfiant, a tiré avec un fusil de chasse sur DeSalvo. DeSalvo n'est pas initialement soupçonné d'être impliqué dans la série de meurtres par étranglement. Après avoir été accusé de viol, il fait des aveux détaillés de ses activités en tant qu'étrangleur de Boston. Dans un premier temps, il avoue ses crimes à son codétenu George Nassar. Nassar rapporte les aveux à son avocat F. Lee Bailey, qui a également pris en charge la défense de DeSalvo. La police est alors impressionnée par l'exactitude des descriptions faites par DeSalvo des scènes de crime. En dépit de quelques incohérences, DeSalvo cite des détails qui avaient été jusqu'alors cachés au public. Dans son livre publié en 1971, La Défense ne se repose jamais (The Defense Never Rests), Bailey raconte que DeSalvo avait raison sur un détail sur lequel l'une des victimes s'était trompée. DeSalvo ayant décrit une chaise bleue dans le salon de la femme, tandis qu'elle avait déclaré qu'elle était marron. Des preuves photographiques finissent par prouver que DeSalvo avait raison. Aucune preuve matérielle n'a étayé ses aveux. À cause de cela, il est jugé uniquement pour des crimes antérieurs non liés aux meurtres, au motifs de vol qualifié et d'infractions sexuelles, pour lesquels il était respectivement connu sous le nom de « L'Homme vert » (« The Green Man ») et de « Monsieur Mètre » (« The Measuring Man »). Bailey utilise les aveux de DeSalvo sur les meurtres dans le cadre de sa défense lors du procès afin d'obtenir un verdict de « non-culpabilité pour cause d'aliénation mentale » pour les infractions sexuelles, mais le juge l'a déclaré irrecevable. DeSalvo est condamné à la prison à vie en 1967. En février de la même année, il s'évade avec deux codétenus de l'hôpital d'État de Bridgewater, déclenchant alors une chasse à l'homme à grande échelle. Une note est retrouvée sur sa couchette adressée au surintendant. Dans ce document, DeSalvo déclare qu'il s'était échappé pour attirer l'attention de l'opinion publique sur les conditions de détention de l'hôpital et sa propre situation. Après son évasion, DeSalvo se déguise en maître de troisième classe de l'US Navy, mais il se rend dès le lendemain. Il est alors transféré à la prison d'État de sécurité maximale de Walpole. Six ans après son transfert, il est retrouvé poignardé à mort dans l'infirmerie de la prison. Son ou ses meurtriers n'ont jamais été identifiés. Théories des tueurs multiplesAvant la confirmation de la culpabilité de DeSalvo par une preuve ADN en 2013, des doutes existent quant à sa culpabilité. Malgré ses aveux, les personnes l'ayant personnellement connu ne le croient pas capable de crimes aussi graves. Certains éléments interrogent l'hypothèse d'un tueur unique, notamment la diversité des victimes et des modes opératoires. En 1968, le Dr Ames Robey, directeur médical du Bridgewater State Hospital, argue que DeSalvo ne peut pas être l'étrangleur de Boston. Il déclare que le prisonnier est « un confesseur compulsif, très intelligent et très doux, qui a désespérément besoin d'être reconnu ». L'opinion du Dr Robey est partagée par d'autres parties prenantes, notamment par le procureur du district de Middlesex, John J. Droney, mais aussi par le surintendant de Bridgewater Charles Gaughan et enfin par George W. Harrison, un ancien codétenu de DeSalvo. Harrison affirme ainsi avoir entendu un autre condamné apprendre et faire répéter à DeSalvo les détails des meurtres par étranglement[12]. Dans son livre publié en 1996 (The Boston Stranglers), Susan Kelly, s'inspire des archives du « Strangler Bureau » du Commonwealth du Massachusetts. Elle soutient que les meurtres sont l'œuvre de plusieurs tueurs plutôt que d'un seul individu. L'ancien profiler du FBI, Robert Ressler, déclare : « Quand on croise autant de modèles différents [concernant les meurtres de l'Étrangleur de Boston], il est inconcevable d'un point de vue comportemental que tout cela puisse correspondre à un seul individu »[13]. John E. Douglas, ancien agent spécial du FBI qui fut l'un des premiers profileurs criminels, doute que DeSalvo soit l'étrangleur de Boston. Dans son livre The Cases That Haunt Us, il caractérise DeSalvo comme un violeur motivé par la notion de puissance (« power-assurance »). Il décrit ce type de violeur comme peu susceptible de tuer à la manière des crimes attribués à l'étrangleur de Boston. Cependant, ce type de violeur motivé par serait enclin à s'attribuer le mérite des crimes. En 2000, l'avocate et ancienne journaliste de la presse écrite Elaine Sharp prend fait et cause pour la famille DeSalvo et celle de Mary Sullivan. Sullivan est désignée comme étant la dernière victime en 1964, bien que d'autres meurtres par étranglement aient eu lieu après cette date. Sharp aide les familles dans leur campagne médiatique pour effacer le nom de DeSalvo. Elle apporte son soutien à l'organisation des exhumations de Mary Sullivan et Albert H. DeSalvo, enclenche plusieurs procédures pour tenter d'obtenir plus d'informations et des preuves de trace (par exemple, ADN) de la part du gouvernement, et travaille avec différents producteurs pour créer des documentaires pour atteindre l'opinion publique[14]. Elaine Sharp note diverses incohérences entre les aveux de DeSalvo et les informations qu'elle finit par obtenir sur la scène de crime. Elle remarque, contrairement aux aveux de DeSalvo concernant le meurtre de Sullivan, qu'une absence de sperme a été constatée dans le vagin de la victime et que celle-ci n'a pas été étranglée manuellement mais par ligature. Le médecin légiste Michael Baden souligne que DeSalvo s'est trompé sur l'heure du décès. C'était une incohérence connue, également relevée plus tôt par Susan Kelly dans plusieurs des meurtres. Elle continue de travailler sur le dossier de la famille DeSalvo[14]. L'avocat de DeSalvo, Bailey, est lui persuadé que son client est le tueur et décrit l'affaire dans The Defense Never Rests (1971)[2]. Preuve ADNLe 11 juillet 2013, la police de Boston annonce avoir trouvé des preuves ADN qui relient DeSalvo au meurtre de Mary Sullivan[15]. L'ADN trouvé sur les lieux est décrit comme une « correspondance presque parfaite » avec l'ADN-Y prélevé sur un neveu de DeSalvo. L'ADN-Y est transmis par les lignées mâles directes avec peu de changement et peut être utilisé pour relier des mâles avec un ancêtre paternel commun. Un tribunal ordonne l'exhumation de DeSalvo pour tester directement son ADN. Le 19 juillet 2013, le procureur du comté de Suffolk, Daniel F. Conley, le procureur général du Massachusetts Martha Coakley et le commissaire de police de Boston Edward F. Davis annoncent les résultats du test ADN prouvant que DeSalvo est à l'origine du liquide séminal récupéré sur les lieux du meurtre de Sullivan en 1964[16]. Dans la culture populaire
Références
Bibliographie
Liens externes
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