La valeur phonétique des lettres empruntées correspond, mutatis mutandis, à celle qu’elles avaient dans le grec de l’époque. Par exemple, le Β bêta (prononcé [b] en grec classique, mais [v] en grec médiéval et moderne) est devenu le В (v) cyrillique ; il a donc fallu créer une lettre de façon à obtenir un graphème pour le phonème [b], en l’occurrence une modification du ve, soit Б.
Depuis l’entrée de la Bulgarie dans l’Union européenne le , le cyrillique en est devenu le troisième alphabet officiel après le latin et le grec.
Usages de l'alphabet cyrillique
Distribution de l'alphabet cyrillique :
Pays où il est utilisé en tant qu'écriture principale
Pays où il est utilisé avec une autre écriture officielle
Il sert également à écrire de nombreuses langues non slaves ou non indo-européennes parlées sur le territoire de la Russie, comme l'oudmourte, le khanty, le nénètse ou l'ossète, ainsi que le mongol ou même le doungane, un dialecte du mandarin. Pour ces langues, il est souvent complété par des signes diacritiques ou des caractères spéciaux, destinés à noter des phonèmes qui n'existent pas en russe[2]. L'alphabet cyrillique est également utilisé pour écrire des langues turcophones d'anciens pays de l'URSS, comme le kazakh au Kazakhstan ou l'ouzbek en Ouzbékistan.
Jusqu'en 1857, une variété d'alphabet cyrillique[3] a également servi à transcrire le roumain ; son emploi a perduré ponctuellement jusqu'en 1918 en Bessarabie. En outre, de 1940 à 1989 (et jusqu'à nos jours en Transnistrie) les pouvoirs soviétique et post-soviétique ont imposé, pour le roumain parlé en URSS (sous le nom de « moldave »), l'usage de l'alphabet cyrillique russe moderne (légèrement adapté), translittéré en lettres latines en Moldavie.
Dans cet article, ne seront traités que les aspects de l'alphabet cyrillique servant à écrire le russe. En effet, dans les autres langues l'utilisant, les lettres peuvent avoir une tout autre valeur. Par exemple, en bulgareъ (dit ер голям (èr goliam)) se prononce comme le ăroumain et le щ se prononce cht.
Constantin Cyrille, dit le Philosophe, a créé l'alphabet et les premières traductions en vieux-slave, d'où son nom. C'est un fait incontestable, mais une des questions est restée sans réponse univoque encore actuellement, et porte sur la création au cours d'une période relativement brève de deux alphabets slaves, à savoir l'alphabet cyrillique et l'alphabet glagolitique. Les avis ne s'accordent pas tous pour affirmer lequel des deux a été créé par Constantin Cyrille.
Selon l'hypothèse la plus répandue sur la création des deux alphabets, le cyrillique ferait son apparition, chronologiquement, après le glagolitique. D'un point de vue acoustique et graphique, le cyrillique est issu de l'onciale grecque. Ce serait Clément d'Ohrid, un des disciples de Constantin (Cyrille), qui l'aurait créé, lui donnant le nom de son professeur. La plupart des scientifiques attribuent l'alphabet glagolitique à Constantin (Cyrille). Il correspond à la composition phonétique de l'ancien slave et possède une graphie originale ; certains chercheurs indiquent que le dessin des lettres suit les règles de la section dorée (les rapports du petit et du grand côté à l'ensemble sont identiques). Si, entre l'alphabet glagolitique et l'alphabet cyrillique, il existe une certaine continuité, ils n'en comportent pas moins des différences significatives. L'alphabet cyrillique remplace rapidement l'alphabet glagolitique, d'abord en Bulgarie orientale, notamment dans la capitale de l'époque, Preslav. À l’école d'Ohrid, l'alphabet glagolitique est plus largement répandu et employé plus longtemps. Dans quelques monastères au bord de la mer Adriatique, en Croatie, le glagolitique a été utilisé en cryptographie jusqu'au XIXe siècle.
Selon la seconde hypothèse, Constantin (Cyrille) serait l'auteur des deux alphabets, ce qui signifierait qu'il aurait traduit les principaux livres liturgiques deux fois. En 855, il aurait créé l'alphabet cyrillique dérivé de l'écriture grecque en l'adaptant au langage slave, pour traduire ensuite les livres liturgiques pour les besoins des slaves de la région du fleuve de Brégalnica (Macédoine du nord-ouest). Plus tard, en 862-863, il aurait créé l'alphabet glagolitique, recopiant les livres déjà traduits afin de donner à sa mission en Grande-Moravie une expression chrétienne universelle.
De nos jours, l'alphabet cyrillique est employé non seulement par les Bulgares, mais également par les Serbes, les Monténégrins, les Macédoniens, les Russes, les Ukrainiens, les Biélorusses aussi bien que par beaucoup d'autres peuples non-slaves de l'ex-URSS, ainsi que par les Mongols : environ deux cents millions de personnes en tout.
L'œuvre de Cyrille et Méthode a été continuée par leurs disciples Clément, Naum, Angelar, Gorazd et Sava qui, à leur arrivée en Bulgarie, ont reçu le soutien du roi de Bulgarie Boris Ier.
Chacun des cinq étudiants a sa propre fête religieuse. Le on célèbre les deux saints, Cyrille et Méthode[4]. Saints Cyrille et Méthode ont été proclamés copatrons de l'Europe en par saint Jean-Paul II.
Les ecclésiastiques vivant surtout dans la région de l'Adriatique du nord ont continué à utiliser l'écriture glagolitique jusqu'à la fin du XVIIe siècle, après quoi elle n'a été maintenue que dans la liturgie ; le dernier document en glagolitique date de la fin du XIXe siècle.
L'alphabet cyrillique doit, plus ou moins directement, plusieurs de ses caractéristiques innovantes par rapport au modèle grec, voire certaines de ses lettres, au glagolitique.
Dans la religion orthodoxe, le 24 mai, jour de l’alphabet slave et des Saints-Frères Cyrille et Méthode, est une fête qui n'a que peu d'analogues : jour de l'écriture, de l'éducation et de la culture. C'est la fête de l'éveil spirituel, de l'aspiration au perfectionnement à travers la science et la culture. Les lettres créées par Cyrille et Méthode, leurs traductions des livres liturgiques en vieux-slave, la défense du droit de chaque peuple à glorifier Dieu dans sa propre langue, ont une importance historique pour tous les peuples slaves. Leur œuvre est humanitaire et démocratique, commune à tous les Slaves et au service de la grande idée humaine d'égalité de tous dans le domaine spirituel.
Lettres
Alphabet originel
Ce tableau présente :
les éventuelles variantes d'une lettre indiquées entre parenthèses sont utilisés dans les cas où l'informatique ne permet pas un rendu fidèle
les valeurs numériques des lettres cyrilliques diffèrent de celles de leurs équivalents glagolitiques
la prononciation est donnée selon l'alphabet phonétique international ; les valeurs entre parenthèses sont des notations utilisées par les slavistes
le nom est indiqué en transcription latine, puis entre parenthèses en vieux slave et en slavon d'église.
Nommée également « i–huitaine », cette lettre provient du η (êta) grec majuscule (Η) que les Grecs prononcent "i" aujourd'hui mais qui autrefois se disait è.
Le tracé de cette lettre peut s'approcher d'un losange. Elle vient du grecο (omicron), mais a plus évolué vers la prononciation de la lettre ω (oméga), comme un o ouvert (exemple : or).
À l'origine, la barre inférieure était au centre, formé d’un ш (ša) superposé au т (tverdo). Prononciation variable en slavon d'église. En russe, on le prononce chtch.
jer ou yer ; actuel signe dur très rare en russe contemporain, courant en bulgare où il a valeur d'une voyelle (notée â), disparu des autres alphabets cyrilliques.
Cette lettre provient du θ (thêta) grec. Elle se prononçait toutefois comme un f, et n'était utilisée que pour la traduction du th grec. Par exemple, le prénom d'origine grecque Théodore était écrit Ѳёдор, qui se dit Fiodor en russe.
Cette lettre fut supprimée du russe en 1918. Elle provient du υ (upsilon) grec. Elle se prononçait i.
Alphabets contemporains
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Alphabet cyrillique contemporain russe
L'alphabet cyrillique utilisé pour le russe compte 33 lettres depuis 1917. Avant cette date, l'alphabet dit « prérévolutionnaire » en comprenait quatre de plus. Celles-ci sont repérées dans le tableau par un fond grisé.
Cette écriture étant bicamérale, chaque lettre connaît deux variantes, capitale et minuscule. Le tableau suivant détaille l'alphabet actuel ; il se lit comme suit :
capitale et minuscule
nom de la lettre en français selon Unicode[6]. Les noms en anglais sont souvent utilisé de manière internationale et sont encore souvent utilisés.
L'alphabet cyrillique se retrouve ainsi sous des déclinaisons plus ou moins anciennes : l'alphabet roumain remontant vraisemblablement au Moyen Âge, et l'alphabet cyrillique serbe inventé à partir du russe au XIXe siècle, lui-même tiré de l'alphabet bulgare.
La graphie manuscrite cursive des lettres cyrilliques diffère autant de la graphie imprimée que nos lettres latines. De plus, dans certaines éditions, l'italique imprimée minuscule suit le tracé des lettres cursives (ce qui, typographiquement, montre la différence entre des obliques et des italiques). Certaines cursives ne sont cependant pas identiques selon qu'elles sont manuscrites ou imprimées (ces lettres sont repérées par la couleur bleue) :
Enfin, en serbe et en macédonien, les italiques cursives des minuscules бгдпт ont encore un autre œil, parfois plus proche encore de la graphie manuscrite :
Codage informatique
De nombreux codages ont été inventés pour gérer l'alphabet cyrillique.
Unicode
En Unicode 9.0, les différentes variantes de l'alphabet cyrillique sont représentées par quatre blocs :
Les caractères de la plage U+0400–U+045F sont simplement une transposition de la table ISO/CEI 8859-5. La plage U+0460-U+0489 correspond aux caractères historiques. La U+048A-U+052F contient les caractères spécifiques aux différentes langues se basant sur l'alphabet cyrillique.
L'Unicode n'inclut globalement pas les caractères cyrilliques accentués, à quelques exceptions près :
les combinaisons considérées comme des lettres à part entière des alphabets : Й, Ў, Ё, Ї, Ѓ, Ќ ;
les deux combinaisons requises pour différencier les homonymes en bulgare et en macédonien : Ѐ, Ѝ ;
quelques combinaisons de slavon d'église : Ѷ, Ѿ, Ѽ.
Cependant s'y ajoutent trois blocs génériques (communs à diverses écritures) pour les signes diacritiques avec ou sans chasse pour compléter le jeu de caractères :
U+02B0 – U+02FF : lettres modificatives à chasse (essentiellement destiné aux notations phonétiques)
U+0300 – U+03FF : diacritiques (caractères sans chasse, qui se combinent à une lettre de base après laquelle ils peuvent être codés)
L'Unicode 5.1, publié le , introduit des changements majeurs, parmi lesquelles l'ajout des blocs cyrillique étendu – A et cyrillique étendu – B, et l'amélioration du support du cyrillique ancien, de l'abkhaze, de l'aléoute, du tchouvache, du kurde, et des langues mordves[9].
Quelques autres langues comme le slavon d'église ont vu leur prise en charge complétée dans Unicode 9.0 avec le bloc cyrillique étendu – C.
Les cursives imprimées ne sont pas distinguées des non-cursives en Unicode, elles sont donc dans les systèmes informatiques distinguées par la famille de polices utilisée.
↑А а, Ъ ъ (= ӑ), Б б, Β β, Ґ γ, Δ δ, Є є, ζ ʝ, С с, І ι, К к, Λ λ, М м, Ν н, О о, П п, Р р, Т m, Υ υ, Ф ф, Х х, Џ џ (= ҭ), Ч ч, Ш ш, Щ щ (= şt), Ђ ђ (= î, â), Ξ ξ (= x), Ζ z : Denis Deletant, Slavonic letters in Moldova, Wallachia & Transylvania from the tenth to the seventeenth centuries, Ed. Enciclopedică, Bucharest 1991.
(en) Ivan G. Iliev / Иван Г. Илиев, Short History of the Cyrillic Alphabet / Кратка история на кирилската азбука, Пловдив / Plovdiv, (ISBN978-619-7016-02-4, présentation en ligne)