Le cimetière des Rois, ou cimetière de Plainpalais, est un cimetière de la ville de Genève où sont enterrés, sur 28 000 m2, certains magistrats genevois ainsi que des personnalités ayant contribué à la renommée de la ville[2].
Histoire
C'est en 1469 qu'est construit l'hôpital des pestiférés de la ville de Genève pour lutter contre les épidémies successives de peste noire dans ce qui est alors un quartier de banlieuemaraîchère. Le cimetière attenant, quant à lui, est créé en 1482 pour y accueillir les victimes de la maladie[1].
Le cimetière tire son nom de « cimetière des Rois » de la rue dans laquelle il se trouve. Celle-ci est nommée ainsi par référence au « roi » des arquebusiers de la ville, dont le terrain d'entraînement se trouvait dans le quartier ; ce titre de « roi » a été décerné entre 1509 et 1847 au concurrent ayant réussi le meilleur tir lors du concours annuel[1].
La ville de Genève entre en possession du cimetière protestant de Plainpalais en 1869. Il est alors géré par l'Hôpital général de Genève. Jusqu'en 1876, seuls les protestants y sont inhumés. Dès 1883, le cimetière est fermé pour les inhumations ordinaires et réservé aux personnes ayant acquis une concession. Le prix de la concession y étant plus élevé que dans les autres cimetières, le nombre d'inhumations diminue et la coutume d'ensevelir à cet endroit les conseillers d'État, les conseillers administratifs ou d'autres personnalités s'installe peu à peu. Autour de 1945, des aménagements sont effectués et le lieu peut désormais être apparenté à un parc.
Végétation
Au XXIe siècle, faute d’inhumations récentes, les arbres occupent le site. Selon Roger Beer, dendrologue et président de la Société suisse de dendrologie[3], qui anime parfois des visites, ils sont dignes d'un jardin botanique. Au premier plan à l'entrée par la rue des Rois, un grand chêne vert, par son feuillage persistant est symbole de vie éternelle. Un hêtre pleureur, penché sur la tombe d'Alfred Vincent lui fait face. Un arbre aux mouchoirs évoque aussi le chagrin. Le cèdre dont les racines déstabilisent une croix de pierre, célèbre la victoire de la vie, comme le sophora qui affole les abeilles lors de sa floraison. Des arbres ont été plantés pour leur utilité dans une industrie locale, comme l'arbre à crayons (Calocedrus) par Caran d'Ache. Le sapin d'Espagne a été apporté par le botaniste genevois Edmond Boissier en souvenir de sa femme décédée lors d'un voyage. La coutume de planter un arbre à côté de la tombe d'un proche n'est plus autorisée. Il en subsiste 60 à 80 espèces différentes, qui mieux que des chrysanthèmes apportent leur ombrage, le souvenir et favorisent la sérénité[4].
Le droit de reposer au cimetière des Rois est strictement limité. En effet, selon l'article 30, alinéa 3,
du règlement des cimetières de la Ville de Genève, seuls des « magistrats et les personnalités marquantes, ayant contribué, par leur vie et leur activité, au rayonnement de Genève »[5] peuvent prétendre à une concession dont la demande doit être faite au Conseil administratif[1].
Plus de 300 tombes sont situées dans le cimetière[6]. Parmi les personnalités enterrées, on compte entre autres[7] :
Du 16 septembre au 30 novembre 2016, à l'occasion des 150 ans du Service des pompes funèbres, le cimetière accueille une exposition d'art moderne, avec des sculptures des artistes Vincent Du Bois, l’initiateur du projet, Sibylle Pasche, Fabrice Gygi et Christian Gonzenbach, et d'autres œuvres de Jérôme Leuba (Battlefield #116, Mass Memorial), Xavier Sprüngli (Respirations, œuvre sonore), Sylvie Fleury (Eternity Now), Sophie Calle (Le Tombeau des secrets), Émilie Ding (Contreventement), Alexandre Joly (The Ship), Robert Nortik (House of Love), Claudio Colucci (Temps d'interrogations), Didier Faustino (This is not a love song), Katja Schenker (Nougat), Vidya Gastaldon (Brothers Eyes) et Gianni Motti (Je vous avais dit que je n'allais pas très bien). C'est un projet de l’association DART en collaboration avec Simon Lamunière[50],[51],[52],[53]. L'exposition comprend 16 œuvres contemporaines, créées pour l’occasion ou prêtées par le Fonds municipal d'art contemporain de Genève, exposées pour une durée variable. Elles « invitent à la rêverie, à la réflexion sur notre rapport à l’au-delà, mais également à la vie ». La concession de la pseudo-tombe créée par Sophie Calle est allouée pour 20 ans. L'objectif de Vincent Du Bois est de « réactiver le regard sur les objets du deuil, l’art dit funéraire, notre rapport à la mort et à ses rites »[54].
Nascita, sculpture de Sibylle Pasche
Sans-titre, autoportrait de Fabrice Gygi
Bruits, sculpture de Vincent Du Bois
La Pieta, sculpture de Christian Gonzenbach
Temps d'interrogations, de Claudio Colucci
Nougat, œuvre de Katja Schenker
Je vous avais dit que je n'allais pas très bien, œuvre de Gianni Motti
House of Love, œuvre de Robert Nortik
This is not a love song, œuvre de Didier Faustino
Plan du cimetière avec l'emplacement des œuvres exposées
Une seconde édition nommée Open End 2 « Renégociation » a lieu du 16 septembre 2022 au 31 janvier 2023. Dix-huit artistes internationaux et locaux proposent alors 18 œuvres et installations sur le thème de l’immortalité et les ressources naturelles.
Une des douze tombes dédiées à M. Cattelan
Une des douze tombes dédiées à M. Cattelan
Philippe Cramer Aeternus Eternus
Du Bois et Beigbeder MDR
Mauro Losa Ultima necat
Chris Murner Animal memorial
Sandrine Pelletier Burnout
Xavier Sprüngli Respirations
Filippo Tincolini Petrolio
Bibliographie
Patrice Rossel, Une visite du cimetière de Plainpalais, Les Îles futures, .
Véronique Palfi, Le Cimetière des Rois, De l'hôpital des pestiférés au cimetière de Plainpalais, Cinq siècles d'histoire, étude historique pour la Conservation architecturale de la Ville de Genève, .
↑Antoine Grosjean (photogr. Pascal Frautschi), « Serpenter entre les arbres au pays des trépassés : Pour la Toussaint, Roger Beer, dendrologue, nous guide parmi les beaux arbres du cimetière des Rois », La Tribune de Genève, 2-3.11.2013, p. 44
↑Post tenebras luxe : le luxe à Genève de la Réforme à nos jours, Genève, Éditions Labor et Fides, , 142 p. (ISBN978-2-8309-1363-7, lire en ligne), p. 53
↑Ana Maria Wangeman et Jean Pian, "Jeanne de Salzmann, le mouvement vers l'Être", in Basarab Nicolescu (Ed.), René Daumal et l'enseignement de Gurdjieff, Bois d'Orion Editions, 2015, p. 237-246