Fernand BaldenspergerFernand Baldensperger
Fernand Baldensperger, né le à Saint-Dié et mort le à Suresnes, est un universitaire français qui compte parmi les fondateurs de la littérature comparée[1]. BiographieIssu d'une lignée de fabricants du textile alsaciens, en particulier son père Philippe, fabricant de tissus, né à Baldenheim en 1830 et mort à Saint-Dié en 1918, et sa mère Julie Haas, Philippe Jules Fernand accomplit sa première scolarité, d'abord à l'école primaire, puis au collège de garçons, toujours à Saint-Dié[2]. Pour exceller en langue allemande, il passe ses dernières années du cycle secondaire à Zürich et à Nancy[3]. Il est bachelier ès lettres en 1888. Après des études au lycée Louis-le-Grand en classe de seconde rhétorique (1888-1889) puis aux universités de Nancy, Heidelberg, Berlin et Bonn jusqu'en 1891, le licencié ès lettres germaniques (allemand) dès juillet 1890, inscrit à l'université de Nancy est reçu deuxième à l'agrégation d'allemand en 1892. Ainsi agrégé à 21 ans, il accomplit son service militaire au 26e de ligne à Nancy[4]. Il entre dans l'enseignement secondaire, principalement à Nancy, à l'école supérieure de commerce en tant que professeur et examinateur. Il obtient en 1893 une licence d'anglais à Lyon et donne, de 1894 à 1898, des cours libres d'anglais à la Faculté de lettres de Nancy. Durant ces périodes, il multiplie les voyages d'études, d'abord en Allemagne en 1894, puis en Grande-Bretagne, en particulier en Angleterre en 1895 et en Écosse en 1897[5]. Il soutient ses deux thèses de doctorat ès lettres le 29 juin 1899 à la Faculté de Paris[6]. La première, en français, s'intéresse à la vie et aux œuvres de Gottfried Keller[7]. La deuxième, en latin, traite du poème "Aladdin" d'Adam Gottlob Oehlenschläger[8]. Ce n'est qu'après 1910 que Fernand Baldensperger accomplit des missions en Russie et en Chine, avant de résider au Japon en 1912. Une carrière universitaireIl enseigne à l'université de Nancy, en tant que maître de conférences en littérature de langue allemande, du au 31 octobre 1900, puis à Lyon du au 23 février 1902 en tant que chargé de cours de littérature comparée puis en tant que professeur du 24 février 1902 au 15 novembre 1910, avant d'être appelé à la Faculté des lettres de Paris par Ferdinand Brunot en tant que chargé de cours de littérature comparée de 1910 à 1919, puis chargé de cours de littératures modernes de 1923 à 1925 et enfin professeur de 1925 à 1935. Ses cours de littérature attirent de plus en plus d'étudiants étrangers, ce qui explique les nombreuses sollicitations d'universités européennes, américaines ou d'Extrême-Orient. À partir de 1903, année où il épouse Marguerite Bonzon, musicienne catholique, à Lyon, et jusqu'en 1912, il collabore à la Revue musicale de Lyon de Léon Vallas. De 1914 à 1916, il est mobilisé. Après les premiers combats, il est nommé interprète de division, puis de corps d'armée. Il obtient la croix de guerre. Cet excellent germaniste et anglophone a ensuite vécu en 1916 en Scandinavie en tant que chargé de mission, puis à New York, avec le statut de coopérant, mis à la disposition de l'Université Columbia entre 1917 et 1919, échappant ainsi aux dernières horreurs de la Grande Guerre. De retour d'Amérique, il est volontaire pour restructurer l'université d'Alsace-Lorraine, il obtient son détachement à Strasbourg. Il a ainsi été professeur de littérature comparée à la Faculté des lettres de Strasbourg de 1919 à 1923[9]. La famille Baldensperger emménage ensuite 55, rue de Vaugirard à Paris[10]. Le professeur à la Sorbonne participe en 1928 au premier cours universitaire de Davos, avec de nombreux autres intellectuels français et allemands. D'une manière générale, chaque été, le professeur Baldensperger, grand voyageur et universitaire de réputation internationale, se retrouvait "chargé de cours" ou "conférencier invité" dans les principales universités d'Europe, d'Amérique et d'Asie[11]. Il dispense régulièrement des cours en Amérique pendant ses séjours en 1925, 1928 et 1932, à Harvard à Boston où il est d'ailleurs nommé définitivement après sa mise en retraite de l'université française le , avant de partir en Californie à Los Angeles, où il séjourne jusqu'à son retour en France après la Libération. Un chercheur en littérature comparée de grande renomméeEn 1921, il fonde avec Paul Hazard la Revue de littérature comparée[12]. « Le champ est immense et la moisson s'étend à perte d'horizon », écrit-il dans son éditorial originel. Il assurera la direction de la revue durant quinze ans, en animera l'esprit jusqu'à la fin. Sa contribution à la connaissance de la littérature et sur l'histoire littéraire est considérable[13]. Notons sa biographie sur Alfred de Vigny et son édition des œuvres de ce dernier in extenso, ses études sur la littérature des émigrés, sur le romantisme, les lettres entre les deux guerres, ses travaux sur Goethe, Benjamin Constant, Balzac, Charles Guérin, Shakespeare... Il est en 1922 le président du premier congrès d'histoire littéraire de Budapest. En 1923, il reçoit le prix Archon-Despérouses[14]. Auteur d'une œuvre consacrée aux patiences de l'érudition (commençant par une thèse sur l'écrivain zurichois Gottfried Keller), auteur d'importantes bibliographies, il utilise le pseudonyme de Fernand Baldenne[15]. Sous ce même pseudonyme, il fait paraître divers recueils de poésies à la forme classique, mais aussi des contes vosgiens[16]. L'origine de la dénomination Baldenne est parfaitement connue : il s'agit d'un raccourci de son nom qu'utilisaient familièrement ses amis parisiens, parmi lesquels figurent Georges Clemenceau, Maurice Barrès ou l'ambassadeur Jules Cambon[17]. Attachement à sa ville natale et vie familialeFernand Baldensperger et sa famille possèdent une belle résidence sur les hauteurs de Foucharupt et n'ont jamais rompu le lien avec Saint-Dié. L'universitaire était toujours volontaire pour aider au développement de la belle bibliothèque de sa ville natale. Rien d'étonnant qu'il ait cultivé l'amitié avec diverses personnalités de la ville et de la montagne vosgienne, à commencer par Auguste Pierrot, Georges Baumont, l'artiste familier du monde slave, Albert Ohl des Marais, le spécialiste du monde scandinave Jean Lescoffier, qu'il avait connu en 1916. Les témoignages abondent sur cette maison des Alouettes, équipée d'un toit surmonté d'un observatoire astronomique en coupole, où l'agréable hôte conviait invités ou amis à scruter le ciel étoilé, au cours de l'entre-deux-guerres, pendant les longues soirées souvent estivales. Membre dès sa jeunesse de la Société philomatique vosgienne, le membre d'honneur dès le début de l'entre-deux-guerres y rédige soit de copieux articles, soit de courtes notes. Lors des festivités de la Ville ou de la société, sa femme et ses filles étaient souvent costumées en alsaciennes. Mais en 1945, de retour des États Unis d'Amérique, il doit vendre, à son grand regret, sa maison de Foucharupt, pour résider dignement à Paris. Il lègue la bibliothèque familiale, installée dans sa demeure, à la bibliothèque municipale dirigé par son vieil ami Auguste Pierrot. La médiathèque "La Boussole" de Saint-Dié-des-Vosges conserve aussi sa bibliothèque personnelle, léguée à sa mort, composée d'environ 5000 volumes qui constitue un fonds dédié à la littérature comparée[18]. Le couple Fernand et Marguerite a eu quatre enfants, deux garçons et deux filles, ils ont eu l'immense chagrin de perdre leur fille aînée, Pauline-Anne qui s'est suicidée le 6 mars 1922 à 17 ans dans la ville de Strasbourg[19]. La relation entre son épouse Marguerite et Georges Clemenceau est racontée dans l'ouvrage de Nathalie Saint-Cricq Je vous aiderai à vivre, vous m'aiderez à mourir (L’Observatoire, 2021)[20]. Fernand décède à 86 ans le 24 février 1958 à Suresnes, 10 quai Gallieni, alors qu'il résidait ordinairement à Paris 13 rue d'Odessa, XIVe arrondissement. Son corps est quelques jours plus tard inhumé au cimetière de la rive droite à Saint-Dié, au lieu-dit La Côte Calot, dans le caveau familial. Quelques élèves connusFernand Baldensperger aimait dire qu'à tous les titres et honneurs reçus au cours de sa carrière d'un demi-siècle, il préférait de loin la fidélité de ses anciens étudiants. Si son interlocuteur lui contestait ce point de vue, il rétorquait que, simple professeur dépourvu de l'amitié de ses anciens élèves, les reconnaissances dans le vaste monde auraient été rares. Fernand Baldensperger est le directeur de la thèse de doctorat que présente en 1925 Marietta Martin (1902-1944), écrivaine et résistante à l’occupation nazie, qui a contribué au journal La France continue. Sur la proposition de Baldensperger, elle a consacré ses travaux à la vie et l'œuvre du docteur Koreff, médecin allemand qui a eu Stendhal pour patient[21]. Le professeur rendra hommage à son ancienne élève après sa disparition[22]. Il contribuera à la publication de deux de ses œuvres en fournissant une interprétation pour Adieu temps[23] et une préface aux Lettres de Leysin[24]. La jeune femme de lettres Irène Némirovsky étudia la littérature comparée sous la houlette de Baldensperger, qui se souviendra d'elle dans son tableau de la littérature moderne[25], ouvrage dans lequel il mentionne David Golder, cet « âpre petit Juif de Russie devenant manieur d'argent aux États-Unis » (La Littérature française entre les deux guerres (1919-1939), p. 67). Honneurs
OdonymieFernand Baldensperger, membre de l'académie des sciences morales et politique, a laissé son nom à une rue du quartier Saint-Roch, alors en réhabilitation au moment de son décès. Un groupe scolaire de ce même quartier de Saint-Dié, initiateur d'une pédagogie novatrice, a plus tard été aussi dénommé en hommage à Fernand et Marguerite Baldensperger. Œuvres
Œuvres (souvent poétiques ou romancées) publiées sous le nom de Fernand Baldenne
Articles ou notices, traductions ou allocutions de Fernand Baldensperger dans le bulletin de la Société philomatique vosgienne
AnnexesBibliographie
Notes et références
Liens externes
Autres liens
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