Georg Friedrich Dentzel, fils d'un maître boulanger, effectue des études de théologie à l'université de Halle puis à l'université d'Iéna. Il s'engage en 1774 comme aumônier protestant au sein du régiment Royal-Deux-Ponts, régiment germanophone, le traité d'Utrecht disposait en effet que les étrangers résidant en France étaient libres de pratiquer la religion réformée.
Après la guerre, le régiment Royal-Deux-Ponts se retire à Landau in der Pfalz, possession française depuis 1648 en vertu du traité de Westphalie. L'aumônier sur le point d'être démobilisé peut obtenir la charge de pasteur de Landau à condition d'être naturalisé français, ce qu'il obtient en : il s'appelle désormais Georges Frédéric Dentzel. Il devient donc premier pasteur et président du consistoire de Landau.
En mars 1793, lui et son collègue Couturier sont dénoncé par des pétitionnaires du Bas-Rhin, et leur rappel à la Convention est appuyé par François Mallarmé (député de la Meurthe) et Rühl[7]. En avril 1793, il est également absent lors du scrutin sur la mise en accusation de Jean-Paul Marat[8]. En mai, il vote contre le rétablissement de la Commission des Douze[9].
En juin, Dentzel est envoyé en mission dans le Bas-Rhin afin d'organiser le rattachement à la France de trente-deux communes du district de Landau[10]. Le 8 nivôse an II (le 28 décembre 1793), il annonce au Comité de Salut public la levée du siège de Landau[11]. Le 17 nivôse an II (le 6 janvier 1794), il est accusé, par les députés envoyés en mission Marc-Antoine Baudot (député de Saône-et-Loire) et Jean-Baptiste Lacoste (député du Cantal), durant sa mission, d'avoir entretenu des connivences avec l'ennemi et d'avoir exercé des violences[12]. Le 27 nivôse (le 16 janvier), il est décrété d'arrestation sur motion de Georges Danton (député de Paris), de François-Louis Bourdon (député de l'Oise) et de Rühl, ces dernier affirmant également qu'il est étranger[13]. En pluviôse (février), alors incarcéré à la prison des Carmes, il proteste auprès de Maximilien de Robespierre (député de Paris) contre sa détention[14].
Après la chute de Robespierre, Dentzel adhère à la réaction thermidorienne. En frimaire an III (novembre 1794), il est libéré sur motion de Jacques-Alexis Thuriot (député de la Marne) qui atteste qu'il est de nationalité française[15]. Il participe à la défense de la Convention lors de l'insurrection du 1er prairial an III (20 mai 1795)[16]. Le 13 prairial (le 1er juin), il dénonce et fait décréter d'arrestation Baudot et Lacoste, qui l'avaient dénoncé un an plus tôt[17].
Le 24 prairial (le 12 juin), Dentzel est envoyé en mission « entre Moselle et Rhin » afin d'y assurer la surveillance des travaux publics[18]. Le 9 fructidor enfin (le 26 août), il est envoyé dans le département de la Manche[19].
Mandat aux Anciens
Sous le Directoire, en vendémiaire an IV (octobre 1795), Georges Frédéric Dentzel est élu au Conseil des Anciens, en vertu du décret des deux-tiers. Il est tiré au sort pour rester au Conseil jusqu'en prairial an VI (mai 1798)[20]. Il est réélu député du Conseil des Anciens aux élections en germinal an VI (avril 1798)[21].
Du Consulat à la Restauration
Le coup d’État du 18 brumaire met fin à sa carrière politique. Le lendemain, lors du vote au Conseil des Anciens, ses convictions républicaines lui donnent le courage de voter contre Napoléon Bonaparte. Conscient des conséquences fâcheuses de ce vote et de ces événements pour sa carrière, Dentzel demande et obtient sa réintégration dans l'armée mais on le nomme directeur de l'hôpital militaire du Mans, fonction habituellement confiée à des officiers retirés du service, puis administrateur de l'hôpital militaire de Landau. Malgré ses demandes d'affectation et ses démarches pour obtenir de rester en activité il est mis à la retraite dès 1801. Il s'installe alors à Versailles, à l'Ermitage, ancienne propriété de la marquise de Pompadour qu'il a acheté en 1799 après avoir cédé les biens qu'il possédait à Landau.
Les demandes répétées de Dentzel pour être réintégré dans le service actif aboutissent enfin en 1806 : il est nommé auprès du vice-roi d'ItalieEugène de Beauharnais puis en Allemagne. Il commande les places de Weimar (où il rencontre Goethe), Varsovie et Vienne occupées par l'armée française. Il est affecté à l'armée d'Espagne en 1810-1811 où il est blessé à Valverde devant Badajoz le , puis à l’État-major du prince d'Eckmühl à Hambourg en . Il fait la campagne de Russie en 1812, est en Saxe en 1813 où il participe à la bataille de Dresde, puis fait la campagne de France (1814). Il est fait chevalier () puis officier () de la Légion d'honneur et est titré baron par Napoléon Ier le . Sa carrière militaire se termine à la fin de l'Empire : il est nommé général de brigade le , la veille de l'abdication de l'Empereur, puis mis en non-activité. Cette dernière promotion lui est confirmée deux fois par Louis XVIII les et sous le nom de maréchal de camp, ce grade, disparu en 1793, étant rétabli sous la Restauration. Il est fait chevalier de Saint-Louis le . Nommé à l’État-major du duc de Berry en , il est affecté à l’État-major général de l'armée pendant les Cent-Jours puis est définitivement mis à la retraite en .
Georges Frédéric Dentzel se retire à Versailles sous la Restauration, où il est membre du consistoire luthérien. Décédé le à Versailles, il y est inhumé dans ce qui était alors le carré protestant, au cimetière Notre-Dame.
Famille
En 1784, Georges Fréderic Dentzel épouse Sybille Louise Wolff, fille de bourgmestre, née le 25 janvier 1765 à Landau in der Pfalz[2], morte le 19 juin 1838 à Versailles[22]. De leur union naissent quatre enfants, parmi lesquels :
Jean-Chrétien-Louis Dentzel, né le 6 mai 1786 à Landau, mort le 3 septembre 1829 à Vónitsa (Grèce). Officier de l'armée française sous le Premier Empire, il est élevé au rang d'officier de la Légion d'honneur en 1817[23]. Lieutenant-colonel en demi-solde sans affectation sous la Restauration, compromis dans les complots de la Charbonnerie contre le régime des Bourbons. Engagé volontaire dans l'armée insurrectionnelle grecque contre les Turcs, le deuxième baron Dentzel est mort célibataire et sans postérité à Vonitza : il était général de l'armée grecque, commandant l'armée de Grèce occidentale.
↑ a et bÉmile Houth, « M. Warringlon Dawson vient de sauver la sépulture historique du Général Dentzel. », Journal de la société des américanistes, vol. 26, no 1, , p. 200–201 (lire en ligne, consulté le )
Friedrich Christian Laukhard : F.C. Laukhards, vorzeiten Magister der Philosophie und jetzt Musketiers unter dem Thadderschen Regiment zu Halle, Leben und Schicksale, von ihm selbst beschrieben und zur Warnung für Eltern und studierende Jünglinge herausgegeben. 5 tomes, 1792-1802.
(de) Otto Mehringer, Georg Friedrich Dentzel. Pfarrer - Jakobiner - General. Ein pfälzisches Schicksal, Speyer (Rhénanie-Palatinat, Allemagne) : Evang. Presseverband der Pfalz, 1983.
Norbert Chales de Beaulieu, Georges-Frédéric Dentzel (1755-1828), une destinée européenne, thèse de doctorat en histoire (université de Paris-IV-Sorbonne) sous la direction de Jean Tulard (1994, inédite).
Norbert Chales de Beaulieu, « Georg Friedrich Dentzel (1755-1828), une destinée européenne », in Contribution à l'histoire de la Révolution et de l'Empire/Beitrag zur Geschichte der Revolution und napoleonischen Zeit (1789-1815), sous la direction d'Hervé Brouillet. Baden-Baden (Bade-Wurtemberg, Allemagne) : AIAT 3/Forces Françaises en Allemagne / Direction de l'Enseignement Français en Allemagne, 1989.