Jacques RigautJacques Rigaut
Jacques Georges Rigaut, né le dans le 7e arrondissement de Paris et mort par suicide le à Châtenay-Malabry (Seine), est un écrivain dadaïste français. Admiré par Breton et Man Ray, habitués aux actes de provocation, il est un des agitateurs les plus actifs du groupe Dada parisien. Sa vie éphémère a fasciné Drieu La Rochelle à qui elle a inspiré trois récits (La Valise vide, Le Feu Follet, Adieu à Gonzague). BiographieEnfance et adolescence (1899-1916)
Fils d'un cadre du grand magasin Le Bon Marché et d'une mère sans emploi, Jacques Rigaut naît le 30 décembre 1898[2],[a]. Il est d’abord un élève brillant au collège Stanislas[4], puis au lycée Montaigne, où il obtient un prix de récitation et de français. Il devient passable et dissipé au lycée Louis-le-Grand où il se fait remarquer par son excentricité et côtoie René Chomette (le futur cinéaste René Clair)[4]. Il obtient son baccalauréat (série « philosophie » avec la mention passable en 1916, et s'inscrit à la faculté de droit[4]. Il se lie alors d'amitié avec Simone Kahn (future Simone Breton)[5], que lui présente un ami du lycée, Max François-Poncet. Sous les drapeaux (1916-1919)
. En , Rigaut devance l'appel et s'engage dans l'armée afin de pouvoir choisir un secteur moins dangereux[7]. D'abord affecté au service automobile à Paris, il part au front dans l'artillerie lourde, en Lorraine, au début de l'année 1918. Le 17 juin, il est bouleversé d'apprendre la mort au front de François-Poncet[8]. « Je suis effondré, je ne sais plus de quel côté me tourner. Il est probablement irremplaçable et en tout cas ma vie était arrangée avec la sienne, parallèlement. Je suis absolument sans courage[9]. » écrit-il à Simone Kahn. Il présente également, dans une lettre à son frère, cet événement comme « la seule chose qui compte et qui donne à tout le reste sa valeur — c'est-à-dire nulle[10] ». Après l'armistice, il reste sous les drapeaux jusqu'à sa démobilisation en octobre 1919[11]. Dada à Paris (1920-1923)De retour à Paris, il commence à fréquenter les milieux littéraires et devient l'ami de Drieu la Rochelle, qui fera de lui le héros de La Valise vide, puis du Feu follet et de L'Adieu à Gonzague. Il rencontre le peintre mondain Jacques-Émile Blanche, qui l'engage comme secrétaire particulier, une fonction qu'il occupera de 1919 à 1923[12]. Ses premiers écrits, Propos Amorphes, sont publiés en 1920 dans la revue Action. La même année, il entre en contact avec les membres du groupe Dada, par l'intermédiaire de son amie Simone Kahn. Il publie un texte intitulé simplement « Jacques Rigaut » dans le numéro 17 de Littérature[13]. Dandy désargenté, vivant chez ses parents, il devient un grand consommateur d’opium, de cocaïne et d'héroïne. Séjours à New York et mariage (1923-1927)Le , Rigaut quitte Paris pour New York. Il publie neuf aphorismes dans The Little Review qui seront ses derniers écrits publiés de son vivant[14]. Lors d'un bref retour à Paris, en octobre 1924, il rencontre Gladys Barber[15], une jeune Américaine fortunée venue en France pour divorcer, qu’il suit à New York, début 1925. Bien qu'il vive dans des conditions matérielles pénibles, il y fréquente les milieux aisés et élégants, et épouse Gladys Barber le [15], mais elle le quitte rapidement, en 1927, lassée de sa toxicomanie. Retour à Paris et suicide (1928-1929)De plus en plus esclave de l'héroïne et de l'alcool, Rigaut vit misérablement à New York jusqu’en [15], date à laquelle il revient subitement en France et reprend une vie mondaine dans une maison prêtée par le surréaliste Paul Chadourne. En 1929 il entreprend une série de cures de désintoxication[16], infructueuses, en clinique à La Malmaison, puis en août à Saint-Mandé. En octobre, il entre dans une maison de repos à Châtenay-Malabry appelée « La Vallée aux loups » (qui fut la maison de Chateaubriand). Après avoir passé une soirée à Paris avec un vieil ami, Jacques Porel, le matin du Jacques Rigaut rentre à Châtenay-Malabry, où il se suicide d’une balle de revolver tirée en plein cœur. Il est enterré le au cimetière de Montmartre, 32e division, avec sa cousine Marcelle Chantal. ŒuvreJacques Rigaut est parfois considéré comme un « écrivain sans œuvre[17] ». Dans son Histoire de la poésie, Robert Sabatier note que « Jacques Rigaut, sans le poème, appartient à l'histoire de la poésie[18]. » Jacques Rigaut a néanmoins laissé une œuvre fragmentaire, composée de nombreux maximes et aphorismes. Il est ainsi présenté comme un « Chamfort noir » par Gallimard, lors de la publication en 1970 de ses écrits réunis par Martin Kay[19]. Rigaut n'a publié de son vivant qu'un très maigre corpus de textes courts. L'essentiel est constitué de cinq textes rédigés entre 1920 et 1922 pour Littérature (en comptant la reproduction de son témoignage au Procès Barrès), auxquels s'ajoutent seulement les « Propos amorphes » publiés dans Action et neuf aphorismes laconiques publiés dans la revue américaine The Little Review en 1923. En 1934, son ami Raoul Roussy de Sales, avec l'aide de Théodore Fraenkel[20], réunit des textes de Rigaut, parfois inédits, sous le titre Papiers posthumes, publiés par l'éditeur des surréalistes Au sans pareil. L'expérience est renouvelée par Martin Kay en 1970. PostéritéDans les artsLe dandysme de Rigaut a charmé Man Ray. Ce dernier affirme qu'il « correspondait à l'idée qu'[il s']était faite du dandy français[21]», et le fait jouer dans un « Cinépoème »[22]. Dans la littératureLa vie et l’œuvre de Rigaut ont inspiré les écrivains qui l'ont côtoyé. Philippe Soupault publie en 1925 En joue !, inspiré par Rigaut[15]. Pierre Drieu La Rochelle écrit trois récits inspirés de Rigaut, dans lesquels il apparait sous les traits du personnage de Gonzague : la Valise vide (1923), le Feu follet (1931) et Adieu à Gonzague (inédit découvert en 1963)[16]. Tristan Tzara évoque Rigaut dans un poème nostalgique « À haute flamme », publié en 1955 et illustré par Pablo Picasso[23]. Au cinémaLouis Malle se réfère à Jacques Rigaut lorsqu'il tourne en compagnie de Maurice Ronet le film Le Feu follet. Il le cite comme point de départ de ce premier film vraiment personnel austère et essentiel et résume sa situation en décrivant un adolescent à qui la vie d'adulte est impossible à concevoir et dont le suicide est un choix de vie[24]. Dans la culture populaireLe chanteur Daniel Darc a été profondément marqué par le film de Louis Malle, le roman Le feu follet de Drieu La Rochelle, et par Jacques Rigaut lui-même. Il fait allusion à l'écrivain dans ses chansons « le Feu follet », « La main sur le cœur » et « Mes amis (tour à tour) ». En 2008, il dédie son album Amours suprêmes à Jacques Rigaut[25]. Dans la série télévisée américaine Criminal Minds (Esprits criminels) — dont tous les épisodes commencent et se terminent par une citation — l'épisode 4 de la saison 1, intitulé Plain Sight (Les Yeux dans les yeux), commence par cette citation traduite de Jacques Rigaut : « Don't forget that I cannot see myself. My role is limited to being the one that looks in the mirror. » (« N'oubliez pas que je ne peux pas voir qui je suis, et que mon rôle se limite à être celui qui regarde dans le miroir. »)[réf. nécessaire]. Liste des œuvresTextes
Œuvres plastiquesCinéma
Publications posthumes
Ce cadavre exquis, écrit à six mains, date sans doute de 1926. On le suppose rédigé lors d'une nuit arrosée au Café de Madrid à Guéthary. Dédié au « Chinois Inconnu », ce court texte multiplie provocations et impertinences diverses.
Notes et référencesNotes
Références
BibliographieMonographies
Ouvrages généralistes
Articles
Anthologies
Romans
Témoignages
Liens externes
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