Jacques d'AbleigesJacques d'Ableiges
Jacques d'Ableiges (1350?-1402)[1],[2] est un jurisconsulte français. Son nom « appartient désormais à l'histoire littéraire de la France », selon Léopold Delisle, administrateur de la Bibliothèque Nationale, en 1880[3],[4]. À l'image de Philippe de Beaumanoir (1250-1296) et de ses Coutumes de Clermont-en-Beauvaisis (1283), il est surtout connu pour son Grand Coutumier de France écrit entre 1385 et 1389[1]. Biographie
Lieu de naissance supposé : AbleigesEn 1914, selon M.L. Polain, il « est vraisemblablement né dans le second quart du XIVe siècle[5] au village d'Ableiges » (p. 412)[6]. Ce dernier se situe dans la vallée de la Viosne, petite rivière du Vexin français, formant les Marais d'Ableiges. Pour autant, si M. Petot pense aussi qu'il y est « sans doute originaire », il appelle à la prudence en 1968, car « rien ne prouve qu'il y soit né » (p. 3)[7]. Dates de naissance et de décès incertainesEn 1916, selon Félix Aubert (1859-1943), il « naquit dans le second quart du XIVe siècle[6] et mourut à la fin de l'année 1410 ou dans les premiers mois de 1411 » (p. 226-227)[5]. Aujourd'hui, si la date de naissance de 1350 reste incertaine, la date de décès de 1402 fait consensus[1],[2],[7]. Origine seigneurialeD'après le sceau, dont Jacques d'Ableiges avait l'habitude de se servir, il est issu d'une « ancienne famille dont les armes portaient une hure de sanglier, au chef chargé de 3 merlettes. Supports : deux lions, et en cimier une hure de sanglier » selon l'avocat Albert Allard[6],[8]. Son père, aussi appelé Jacques d'Ableiges[7], était un des seize examinateurs du prévôt de Paris, au Châtelet[2]. Pour M. Petot, il est « probable » que le fils ait « succédé à son père dans cet office [...] » (p. 6)[7]. Famille : une femme et un enfantÀ l'appui de paiements du - pour du vin offert à la baillive (« femme du bailli »[9]) - M.L-Polain déduit que Jacques d'Ableiges est marié au moins depuis 1380 (p. 415)[6]. D'après un document du su des Extraits des Registres d'audience du Châtelet (msc Clairambault, 763, p. 37, Nibl. nat.), son épouse[5] Françoise de Bray est morte avant 1411[4]. Avec elle, et après le Grand Coutumier, il a un fils appelé comme lui Jacques[4], qui fut émancipé le [5]. Affaire de cœur, proche d'être meurtrièreLe , il fait la cour à la femme de son ami Nicolas Odde, ancien trésorier des guerres[5], sergent d'armes du roi[7]. Cette galanterie - « trop pressante, brutale même, sans aucun succès d'ailleurs » selon Félix Aubert[5] (p. 227) - « faillit lui coûter la vie »[5],[6]. Pierre Petot raconte : « une nuit, pendant l'absence du mari, il alla jusqu'à enfoncer la porte du logis, qu'on refusait de lui ouvrir » (p. 7)[7]. Le , l'ami outragé, et lui, se rencontrent à Paris, rue Pierre-au-Lard[5],[7]. Après lui avoir reproché sa conduite, il lui donne un coup de couteau en pleine poitrine[5],[10], qui lui laisse une blessure sérieuse[4]. Si cette affaire marque un frein à son début de carrière, M. Odde obtient, dès le 9[7] ou [5], des lettres de rémission du roi Charles V[10],[4],[5]. À la différence des autres sources, M.L-Polain confirme cet événement ; mais date la lettre de rémission au - et surtout - l'accorde à « Jacques Lempereur », et non à Nicolas Odde[6]. Simple « peccadille de jeunesse » pour M. Petot (p.7)[7], ces événements ne sont pas étrangers à la dédicace de Jacques d'Ableiges à ses quatre neveux dans la préface de son Grand Coutumier[4],[5]. Il les exhorte à imiter la conduite de leur grand-père « refridée et meurée », plutôt que la sienne[5], ou celle de leur oncle[11], qu'il juge « si enfancibles et si volages »[4],[11]. Il leur rappelle même l'adage selon lequel « les passions volages renversent l'esprit même éloigné du mal » (p. 29)[4]. Carrière
Dans un premier temps, il est magistrat pour le compte de seigneurs du roi de France entre 1371 et 1380. Mais cela ne l’empêche pas d'être aussi examinateur au Châtelet[11] (1375)[7], puis avocat à Orléans (1377)[13]. Dans un deuxième temps, ses qualités de juristes[2],[6] le font accéder à l'administration royale[7]. Il y sera tour à tour, bailli de Chartres (1380)[3],[4], puis de Saint Denis (1380/1)[7],[5], et enfin, d'Evreux, de Breteuil et de Conches (1385-1388)[3],[4]. Dans un troisième et dernier temps, il abandonne l'administration royale[3],[4] ; pour retrouver la ville de Chartres, non plus comme bailli, mais comme maire du Chapitre (1389)[14],[3]. Il y ajoute une activité d'avocat, au Châtelet (1391)[3],[1], comme à Tournai (1391-1392)[5],[8]. 1371-1380 : magistrat de cour seigneuriale, examinateur, et avocatDès 1371, il commence par être secrétaire du duc de Berry[3], Jean Ier de Berry[7], frère du roi de France Charles V[6]. Il partage cette charge avec d'autres officiers[7]. Outre l'honneur de cette première fonction, il confie avoir gagné de « grans prouffis »[7]. Avant de devenir avocat à Orléans en 1377[13], il est examinateur au Châtelet[11] en 1375[7]. En 1378, il aurait joué le rôle de conseiller du comte de Blois, Jean II de Blois-Châtillon, selon Paul Guilhiermoz (p. 665)[13]. 1380-1389 : bailli royal1380-1384 : bailli de Chartres, puis de Saint-DenisEn premier lieu, en , il succède à Jean Noël[7] à la fonction de bailli royal de Chartres[3],[4]. Mais, 6 mois seulement après, Jean Richète le remplace en [7]. Les motifs de cette « prompte disgrâce » selon M. Petot sont inconnus[7]. Cependant, il suggère qu'elle peut-être simplement un effet collatéral de la mort du roi de France Charles V, le [7]. En deuxième lieu, dès la fin de la même année ou au début de 1381[7], il remplace Jean Saince[5] en qualité de bailli de l'abbaye de Saint-Denis. À noter que le village d'Ableiges était une paroisse qui relevait du patronage de l'abbaye de Saint-Denis[6],[4]. Mais, Guy de Monceau, abbé de Saint-Denis, le dépose de sa charge de bailli à la fin de 1384 ou en début de 1385[6],[7]. En même temps, en 1383 et 1384, il a pu aussi être bailli de la reine Blanche, selon Paul Guilhiermoz (p. 665)[13]. 1385-1388 : bailli d'Evreux, de Breteuil et de ConchesEn troisième lieu, de 1385 à 1388, il est bailli d'Evreux, de Breteuil et de Conches[3],[4]. Si la date précise de sa nomination comme bailli d'Evreux n'est pas connue, elle est estimée antérieure à la fin [7]. Fin , il n'est plus bailli d'Evreux[7]. Après avoir remplacé Jean Bauffes dans cet office, c'est Guillaume Mauternes qui lui succédera[6],[12]. En 1387[6] ou 1388[5], les généraux réformateurs le désignent, avec Adam Le Vasseur[7], pour mener l'enquête sur les abus et les excès du bailli et des officiers royaux de Tournai. Selon MM. Aubert[5] et Polain[6], dans cette mission, il ne brille pas par son honnêteté. Malgré les « moult chargiez par les dittes informations et dignes de grans punicions crimineles »[6], il fait disparaître des pièces de son enquête, pour éviter de compromettre des accusés[5],[15]. Parmi eux se trouve Jean Boutillier, célèbre auteur de la Somme rurale[5],[6],[15]. En 1389, il doit abandonner l'administration royale[3],[4]. Comme MM. Delisle[12] et Polain[6], il est permis de penser que la prévarication précédente y soit à l'origine. « Son manque de scrupules pourrait bien expliquer ces retraits d'emploi » pour Félix Aubert[5]. 1389-1394 : maire et avocat1389, maire de Chartres, puis 1391, avocat au ChâteletLe , il revient à Chartres, et est élu maire général et principal du Chapitre[14],[3]. Son serment est prêté devant Jean Acarie [16],[4]. En 1391, il se retrouve avocat au Châtelet[3],[1], sans pour autant avoir été après avocat au Parlement[2]. 1391-1394 : avocat, puis conseiller à Paris, de la commune de TournaiDu au [5],[8], il sera avocat (conseiller) pensionnaire de la commune de Tournai[13]. Si la durée de son engagement était prévue initialement pour trois ans, son refus d'accepter la diminution du traitement des officiers de la ville, le fit renoncer à sa fonction, après une transaction du [6]. Les termes de cette convention témoignent de son « âpreté en matière d'argent », selon M.-Louis Polain (p. 415)[6]. Toutefois, la ville de Tournai le conserve parmi ses conseillers à Paris, pour le reste de son engagement primitif, jusqu'au [6]. Le Grand Coutumier de France, œuvre maîtresseIl est célèbre pour avoir rédigé et publié entre 1385 et 1389[1], sous le règne de Charles VI, le Grand Coutumier de France[17]. Selon sa notice imprimée à la BNF, il s'agit d'une « compilation d'ordonnances, de traités et d'autres pièces concernant le droit français »[18].
Plus simplement, quelques historiens lui préfèrent le nom de « (Grand) Coutumier de Charles VI »[17],[2] depuis le XVIIIe siècle[7]. Au XVe siècle, il a aussi pour titre celui de « Style du Châtelet »[6],[7], qui est le nom de deux de ces manuscrits[13]. Il faut dire que c'est « avant tout une compilation de droit parisien », selon Paul Guilhiermoz (p. 664)[13]. Malgré ces appellations, le Grand Coutumier n'aura jamais eu de caractère officiel[7],[19]. Avant son succès, il était destiné « à l'usage familial » rappelle l'auteur dans sa préface[2]. D'ailleurs, dans cette dernière, Jacques d'Ableiges n'hésitera pas à l'appeler sa « petite compilation », ou son « livret[7] [...] aconqueilly d'autre part, et acquesté sur aultry sens »[2],[17]. Bibliographie
Notes et références
Liens externes
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