Fils de banquier, vivant confortablement de ses rentes, Jean Dreyfus-Stern n'est pas dans la nécessité financière de vendre ses tableaux, pas plus qu'il n'a le souci d'accéder à la célébrité[3]. Ce « grand bourgeois » n'a nul besoin d'exposer (même si après sa participation au Salon des artistes décorateurs de 1925 ses œuvres, alors largement et élogieusement remarquées par le monde des critiques d'art[4], sont présentées à Madrid, Copenhague, La Haye, Tokyo, Rio de Janeiro), confirme Gérald Schurr, expliquant par là l'oubli dont la vente de son atelier en 1981 le fera ressortir[5].
Si, dans les paysages de Jean Dreyfus-Stern (notamment de la Bretagne et de Honfleur), « les couleurs sont franches comme dans les œuvres de son ami Louis Neillot », c'est sa représentativité des qualités diverses inhérentes à la nature morte qui fait que, lors de sa visite du Salon d'automne de 1933, Michel Florisoone le remarque en même temps que Maurice Asselin, Frédéric Deshayes, Henri Manguin et Carlos-Reymond : « solidité, matière grasse, fluidité de rapports »[6]. Jean Dreyfus-Stern est aussi l'un des rares artistes de son temps à investir les mondes du cirque (Acrobates sous les feux des projecteurs) et du sport (Peloton cycliste, Arrivée de course à pied)[7].
Jean Dreyfus-Stern est le beau-père du biologiste François Gros, ce dernier ne dédaignant pas d'évoquer notre artiste dans ses conférences, toutes scientifiques qu'elles soient[8].
« Lorsque vous regardez un tableau dont vous subissez le charme, ne ressentez-vous pas quelque chose d'analogue dans le domaine de l'émotion à ce que vous éprouvez à l'audition d'une belle page musicale? Il y a donc dans la peinture autre chose que la représentation des objets, il y a un élément d'ordre affectif, émotionnel, profond, aussi éloigné de la réalité que la phrase musicale, un élément mystérieux, poétique... C'est ce quelque chose par quoi l'artiste a pu insuffler à la nature un peu de son cœur, un peu de son âme. La musique et la peinture ont tant de points communs qu'il a été nécessaire d'emprunter le vocabulaire de l'une pour parler de l'autre; à l'art d'imitation correspond l'harmonie imitative; on dit d'un tableau qu'il est bien harmonisé, on parle aussi de dissonance colorée. Il faut avoir l'œil musical tout comme on a une oreille musicale. Il faut chanter juste avec son pinceau. »[7]
Expositions
Expositions individuelles
Dreyfus-Stern - Nus et natures mortes, Galerie Marguerite Henry, 35-37 rue de Seine, Paris, 1926[10].
Claude Robert, Vente de l'atelier Jean Dreyfus-Stern, Hôtel Drouot, Paris, .
Le peintre devant son miroir, 222 autoportraits XVIIIe - XXe siècles, Collection Gérald Schurr, Le Louvre des antiquaires, Paris, mai-.
Réception critique
« Dreyfus-Stern: il y a là un peintre. Il a trouvé le moyen de nous intéresser très vivement. Un motif sobre, vrai et difficile. » - Arsène Alexandre[13]
« Coloriste raffiné, souvent très audacieux mais toujours avec bonheur, Dreyfus-Stern sait admirablement tenter et réussir ses harmonies en rouge sur rouge et en gris-bleu et vert sur gris-et-vert, qui sont une délectation pour l'œil... Il est incomparable dans la notation des paysages mouillés qu'ils soient de Paris, de Honfleur ou de Brive, où l'humidité et le reflet des eaux donnent à l'air des couleurs de perle. Mais il sait aussi opposer avec force, dans de grandes compositions très décoratives, de larges plans en tons puissants. » - Robert Margerit[14]
« Si singulier que le fait paraisse, Jean Dreyfus-Stern ne fait ni du Derain, ni du Matisse, ni de l'Utrillo, ni même du Segonzac: ses défauts et ses qualités sont à lui, il n'est affilié à aucune secte de théoriciens... Tout lui est bon à prendre, un nu tiède et fauve sur des coussins pourpres, un bouquet, une fille assise sur une banquette de café et qui guette sa proie, un portrait finement analysé, un effet de neige. Les natures mortes surtout me paraissent excellentes. Voici donc un artiste loyal, personnel, dénué de parti-pris, uniquement épris de matière, de valeurs et de construction équilibrée. » - Louis Vauxcelles[14]
Sportifs courant, deux dessins fusain et pastel 105x72cm, 1938 (études pour la décoration de la salle de gymnastique du lycée Janson-de-Sailly, Paris)[20] ;
Nature morte, huile sur toile 24x35cm, avant 1946[21];
↑René Édouard-Joseph, Dictionnaire biographique des artistes contemporains, tome 1, A-E, Art & Édition, 1930, p. 425
↑Françoise de Perthuis, Jean Dreyfus-Stern, in La Gazette de l'Hôtel Drouot, no 6, 6 février 1981.
↑Articles de François Thiébault-Sisson (Le Temps), Arsène Alexandre (Le Figaro), Maurice Raynal (L'Intransigeant), André Warnod (L'Avenir), Charles Fegdal, Léon Martin (Le Journal littéraire), Maurice Letellier (Le Petit Parisien), Édouard Sarradin (Les Débats)…
↑Gérald Schurr, Le guidargus de la peinture, Les éditions de l'amateur, 1981.
↑ Michel Florissone, « À travers le Salon d'automne - La nature morte », L'Art et les Artistes, tome XXIX, 1933, p. 64.
↑ a et bCatalogue de la vente de l'atelier Jean Dreyfus-Stern par Claude Robert, Paris, février 1981.