Magistrat de BruxellesLe Magistrat de Bruxelles désigne l'ensemble des titulaires de fonctions politiques liées à la gestion de la ville de Bruxelles, tous pouvoirs confondus, tels qu'institués du XIIIe siècle à 1795 - soit la période où la ville relevait du duché de Brabant[1]. Cadre historiqueLe XIIIe siècleLe XIIIe siècle est la période où les villes s'émancipent du pouvoir ducal. Le premier cadre juridique du magistrat de Bruxelles est d'ailleurs la Charte de Bruxelles ((nl)Stadskeure van Brussel) octroyée par Henri Ier de Brabant en 1229 qui institue, entre autres, les fonctions d'amman et d'échevins. 1794-1795 : l'occupation françaiseAprès avoir remporté la bataille de Fleurus contre les Impériaux le , les armées de la République Française occupent l'ensemble des Pays-Bas et de la principauté de Liège ainsi que d'autres territoires du Saint-Empire jusqu'à la rive gauche du Rhin. Le commandement militaire sur les anciens Pays-Bas est confié au général Ferrand[2]. Le 24 fructidor de l'an II () les représentants du peuple Briez et Haussmann nomment un nouveau magistrat dont la structure reste pareille à celle de l'ancien régime si ce n'est l'augmention du nombre des mandats d'échevin et qui est formé de l'amman, du lieutenant amman, d'un bourgmestre, de douze échevins, d'un bourgmestre des nations, de six conseillers des nations, de deux pensionnaires, d'un surintendant et d'un receveur du canal et de quatre greffiers[3]. 1797 : cession officielle des Pays-Bas à la France, par l'EmpereurL'année 1795 est celle de l'occupation du territoire par la France jusqu'au traité de Campoformio du par lequel l'Empereur François II, dernier duc de Brabant, cède officiellement et à perpétuité sa souveraineté sur ses provinces des Pays-Bas autrichiens à la République Française, date où elles deviennent officiellement en droit international territoire français[4]. La République Française institue la souveraineté nationale et la séparation des pouvoirs. Désormais le pays est dirigé par des lois votées démocratiquement dans une assemblée nationale bicamérale élue au suffrage censitaire[5] (Conseil des Anciens et Conseil des Cinq-Cents) formée des représentants de la Nation qui mettent en place pour l'ensemble du territoire français un nouveau découpage territorial et une nouvelle architecture administrative qui est restée dans ses grandes lignes inchangée jusqu'au XXe siècle en Belgique. Plusieurs bruxellois firent partie des assemblées nationales à Paris comme : Charles-Lambert Doutrepont ou Martin Féry, professeur de philosophie à l'université de Louvain, franc-maçon, élu l'an IV député au Conseil des Cinq-Cents. Le mot bourgmestre disparait et Bruxelles est désormais dirigée par un maire nommé par le pouvoir central à Paris. Le titre de bourgmestre revient en 1815 sous le royaume uni des Pays-Bas, et est encore en usage de nos jours, mais la fonction qu'il recouvre est très différente et son pouvoir est uniquement exécutif. Les bourgmestres d'ancien régime sont l'émanation de la bourgeoisie bruxelloise, et cumulent les trois pouvoirs, exécutif, législatif, judiciaire, et les pouvoirs économique et militaire ; ils sont indépendants du pouvoir central (les ducs de Brabant). L'administration de BruxellesLa Magistrature de Bruxelles se composait de la façon suivante[6]. Ces magistrats cumulaient les trois pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ; ils administraient la commune, levaient et répartissaient les impôts et étaient également les chefs militaires[7]. L’ammanL'amman[8] est un membre du Magistrat, nommé par le duc et dont il représente et assure le pouvoir judiciaire, au sens très large où il s'entendait à l'époque où il combinait les fonctions de chef de la police, de procureur, de juge, de responsable des prisons... La plus ancienne nomination connue pour un amman à Bruxelles remonte à 1125, soit avant même l'apparition du duché de Brabant. À cette époque les fonctions judiciaires étaient détenues par le vicomte - voir comté de Bruxelles. Le caractère héréditaire du titre et donc du pouvoir qui en découlait, privait les ducs du droit de nomination à ce poste important. Ils valorisèrent donc l'ancienne fonction d'amman, dont ils pouvaient contrôler le détenteur. En 1334 l'ammanie de Bruxelles s'étendait sur Bruxelles et six "mairies" : Vilvorde, Kampenhout, Rhode-Saint-Genèse, Asse, Merchtem et Kapelle-op-den-Bos[9]. Un lieutenant-amman est institué à partir de 1419, pour seconder et remplacer l'amman[10]. Au XVIe siècle, l'amman hérite des fonctions dévolues de longue date au vicomte ou au châtelain de Bruxelles. Ce titre ne relevait pas de la noblesse mais correspondait à une charge héréditaire dont l'objectif était la garde de la ville. Au XVIe siècle, donc cette charge fut répartie entre l'amman, pour les fonctions de police, et les gouverneurs militaires. Le titre, vidé de toute charge, s'est néanmoins perpétué jusqu'à la fin de l'ancien régime[11]. Le 37e et dernier vicomte de Bruxelles fut Léopold van der Gracht, né en 1786. Le Bourguemaitre [sic]Sept échevinsNeuf conseillersDeux trésoriersLe greffier de la TrésorerieDeux receveursLe surintendant du canalDès 1550 un surintendant est nommé pour superviser les travaux de creusement du canal de Willebroeck - qui sera inauguré en 1561. Le premier titulaire est Jean de Locquenghien, membre du Lignage Sleeuws, précédemment échevin et bourgmestre de la ville ; il restera en charge jusqu'à sa mort en 1574. Le surintendant était chargé de la gestion de l'exploitation du canal[12]. Le receveur du canalLe PensionnaireTrois secrétairesDans les villes du duché de Brabant, la charge de secrétaire de la ville consistait à gérer la chancellerie et les tâches administratives. Dans les grandes villes, cette charge était souvent confiée à un juriste ou une personnalité de premier plan dans les lettres. La ville de Bruxelles quant à elle avait simultanément trois secrétaires. Trois greffiersLa ville de Bruxelles avait trois greffiers. LégislaturesDésignation du magistratLe magistrat de Bruxelles était renouvelé à la Saint-Jean d'été, c'est-à-dire le , suivant la "keuse" se déroulant aux ides de juin, soit le . AnomaliesIl est intéressant de relever les anomalies de la succession régulière des mandats et des législatures.
Partage du pouvoir entre Lignages et NationsJusqu'en 1421, ces fonctions étaient exclusivement attribuées à des membres des Lignages de Bruxelles, c'est-à-dire à l'aristocratie de la ville. Au-delà, à la suite de la révolte de 1421, elles furent partagées avec des membres des Nations de Bruxelles, c'est-à-dire des cadres dirigeants des corps de métiers et négoces. La suprématie des Lignages de Bruxelles était fondée sur une communauté d'intérêt qu'elle partageait avec la dynastie ducale de Brabant. « La suprématie rarement menacée des milieux lignagers bruxellois, assise sur une communauté d'intérêts avec une dynastie ducale d'une continuité remarquable, encouragée par les moyens financiers dont disposait le patriciat pour satisfaire aux besoins d'argent des ducs, forgea la suprématie de la ville dans le duché. Elle explique l'analyse de la situation à laquelle se livrèrent les envoyés de Philippe le Hardi, à la fin du XIVe siècle. Après quelques années de négociations en vue d'assurer au duc de Bourgogne ou à un membre de sa famille, la succession de la duchesse Jeanne, les envoyés d'abord tiraillés entre les opinions divergentes et sans doute très partiales des secrétaires de la duchesse, dont l'un soutenait Bruxelles et l'autre était favorable à l'ancienne première ville, Louvain, finirent par recommander au duc de se concilier les bonnes grâces du Magistrat de Bruxelles. Cette ville, disaient-ils, était plus puissante que les autres ; sa faveur suffirait à emporter une décision au bénéfice du duc de Bourgogne, les autres villes n'ayant que peu de poids. »[14] À leur première fonction civile et judiciaire correspondait leur rôle d'échevins c'est-à-dire de juges et d'administrateurs de la ville ; à leur seconde fonction militaire correspondait leur rôle de chefs des milices et de la cavalerie urbaines puis de capitaines des gardes bourgeoises ; à leur troisième fonction correspondait leur rôle dans le développement économique et leur service pour le bien-être de la population en tant que dirigeants de la Suprême Charité, fondateurs et gestionnaires d'hôpitaux, d'hospices et d'institutions de bienfaisance ainsi qu'en tant que Doyens et Octovirs de la Chambre de Commerce appelée Gilde Drapière, Surintendants du canal de Bruxelles ou responsables des travaux et de l'embellissement public. En 1306 eut lieu une sanglante révolte des Métiers qui avaient contraint les gens des Lignages à se réfugier dans la forteresse de Tervuren, puissant château fortifié des ducs de Brabant[15]. Mais le duc de Brabant ayant pris fait et cause pour les Lignages, ceux-ci purent entreprendre une contre offensive contre les Métiers qui furent vaincu près de Vilvorde la même année. La victoire des Lignages est alors totale, mais précède une période de développement économique de la ville ; de plus, une paix civile entre Lignages et Nations s'imposait pour faire face aux menaces extérieures - voir, entre autres, les velléités du comte de Flandre lors de la Guerre de succession du Duché de Brabant. C'est dans ce contexte positif que dès 1356 et 1357, des tisserands et des foulons furent choisis parmi les échevins, et que dès 1359 des membres des métiers purent participer avec les Lignages au contrôle des comptes des receveurs[16]. En 1420, Philippe de Saint-Pol profite de la faiblesse et de l'absence du duc Jean IV de Brabant - son frère - et s'appuie sur les Nations pour s'imposer comme Ruwaard (nl) (régent) du Brabant. Les Lignages défendent la légitimité de Jean IV - dont ils tiennent leur propre pouvoir - et assiègent Bruxelles avec une troupe de 1500 cavaliers le . En réaction, les Métiers s'emparent de la Grand-Place, assiègent le tout nouvel hôtel de Ville (1404), massacrent cinq membres des Lignages (dont Éverard, fils d'Éverard t'Serclaes) et en torturent vingt-et-un autres. Philippe de Saint-Pol établit un équilibre entre les deux parties par son édit du qui partage l'administration de Bruxelles entre les Lignages, possesseurs du sol et des libres alleux bruxellois et les Nations, représentants du pouvoir économique de la ville - revenu au pouvoir, Jean IV reconnaitra cet édit le suivant. Concrètement, après installation du magistrat des Lignages, nommés par le duc, les doyens des corporations leur présentaient 49 candidats ; le bourgmestre des Lignages et les échevins choisissaient alors le bourgmestre des Nations et les six conseillers ainsi que cinq personnes parmi lesquelles les Nations pouvaient choisir à leur gré deux receveurs. Ces membres du magistrat des Nations prêtaient serment devant le bourgmestre et les échevins des Lignages[17]. La suprématie des Lignages sur les Nations était donc doublement consacrées : d'une part le magistrat des Lignages nommait les magistrats issus des Nations et d'autre part le nombre de ceux-ci resta toujours inférieur au nombre de ceux-là. On notera de surcroît qu'il n'était pas exclu pour un membre des Nations de se faire reconnaitre a posteriori comme membre d'un Lignage. C'est le cas de Gabriel van Bemmel, nommé bourgmestre des Nations le et admis au sein du lignage Roodenbeke en 1598. Autonomie de la Ville à l'égard du DucSelon le droit en vigueur pour la Ville et la Cuve de Bruxelles, les Bruxellois n'avaient comme seuls dirigeants et autorités que les membres du magistrat de la ville : « Hors les cas dont la connaissance appartenait aux tribunaux dont nous venons de parler [N.B. : Conseil de Brabant, tribunal de la foresterie, etc.] les bourgeois et les habitants de Bruxelles ne reconnaissaient d'autre autorité que celle de leurs magistrats ; ceux-ci étaient juges au civil et au criminel, en même temps que législateurs, administrateurs et chefs militaires de la commune ; ils répartissaient les impôts et servaient d'intermédiaire entre le peuple et le souverain »[18]. Cette autorité du magistrat s'entendait intra muros, à l'intérieur des murs de la Ville et sur tout le territoire de la cuve de Bruxelles ayant les mêmes droits que la ville. Cette autonomie, pourtant, est toute relative pour trois raisons.
Comparaison avec les autres grandes villes du DuchéVoir : Louis-Prosper Gachard, Collection de documents inédits concernant l'histoire de la Belgique, tome troisième, Bruxelles, Louis Hauman, 1835, p. 15. MandatairesDe la liste des mandataires connus, l'on peut dégager quelques patronymes récurrents et quelques personnalités connues indépendamment des mandats qu'elles ont exercés.
Sur base des données disponibles, quatre familles ont obtenu plus d'une centaine de mandats : les familles Pipenpoy (120), Vanden Heetvelde (126), de Mol (135) et Vander Noot (213).
Sources et bibliographieSigillographie
Sources du XXIe siècle
Sources du XXe siècle
Sources du XIXe siècle
Sources du XVIIIe siècle
Notes et références
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