Son enfance, dans le Sud de la France, est marquée par la perte de son père[1],[2]. Autodidacte[3], ayant dû abandonner ses études en raison d'un accident[4], Annick Foucault gère d'abord une boutique de prêt-à-porter[4].
Minitel
Annick Foucault s'intéresse ensuite au Minitel[5], qu'elle considère comme « un excellent moyen de communication, une sorte de no man's land où tout est permis[6] », participant à divers forums. Elle monte un « forum de débat », consacré au sado-masochisme, avant de lancer en 1994 son propre « réseau minitel » spécialisé, sous le nom de Miss M[4]. Marc Daum la qualifie à ce titre de « grande ordonnatrice de messagerie 3615 pour le compte d’un major de la télématique, la bonne tenue intellectuelle de ses forums lui [valant] la fidélité de lecteurs avertis[7] ». Elle dirige en même temps une revue, La Scène, vendue à 3 000 exemplaires[8]. En , elle apporte une « précieuse collaboration » à la journaliste Monique Ayoun pour un article consacré au Minitel dans Biba[9].
Écrivaine
En 1994, Annick Foucault, qui jouit déjà d'une forte notoriété dans les milieux spécialisés[10]
, publie sous son véritable nom[11]— chez Gallimard, souligne Anne-Élisabeth Moutet[12] — un récit autobiographique (voir infra).
Ce récit est selon Jean Pache« étrange et prégnant[3] ». Il s'agit de « son histoire, son enfance, la découverte de sa sexualité cérébrale, son expérience de dominatrice, dans un style aussi précis que vif et littéraire » selon Céline du Chéné[13]. Le texte est préfacé par Pierre Bourgeade, qui le considère comme l'expression d'une « liberté inconsciente d'elle-même[14] ». Jean-Jacques Pauvert le présente de son côté comme une « œuvre majeure de la littérature érotique de ces dix dernières années[15] ».
Dans cette autobiographie, l'auteure se présente sous un double visage : Françoise la dominatrice; Marianne qui a découvert son masochisme avec les « grands films de sévices » de son enfance en particulier ceux de pirates et leurs « femme[s] attachée[s] au mât d’un navire pour recevoir le fouet[13] »
. Anne Larue de son côté souligne la constitution d'un lien entre deux facettes : « Françoise, c’est d’abord le nom d’une petite fille de douze ans [...] qui joue à la maîtresse[16] ».
L'ouvrage introduit le sado-masochisme dans la littérature grand public, « sans censure, mais aussi sans complaisance pour le lecteur[11] », en mettant en lumière les « cassures » qui y conduisent[17], sous un angle qui recueille l’assentiment de ses partenaires (le point de vue d'auteure-actrice Annick Foucault exposé par Jean-Pierre Dufreigne[18])
. Annick Foucault suggère qu'on reconnaisse aux partenaires une « certaine faiblesse » et commente : « Si cette faiblesse est théâtralisée, si elle est jouée, où est le problème ? Ils ressortent renforcés, troquent leurs chaînes pour un costume trois-pièces, et rentrent chez eux apaisés, fortifiés[19]. »
Elle plaide de plus pour un abandon de certains préjugés[20]
. Ses réflexions font écho à la pensée philosophique de Gilles Deleuze, auquel elle rend hommage[21]
. Une manière qui témoigne d'une « réflexion perceptive et fascinante sur la présentation par Deleuze de La Vénus à la fourrure de Sacher-Masoch »
, selon Charles J. Stivale[22].
Selon Céline du Chéné, Maîtresse Françoise est « probablement la plus intellectuelle des dominatrices de la scène parisienne », possédant « toutes les éditions » de Leopold von Sacher-Masoch et « ayant entretenu une correspondance avec Gilles Deleuze »[13]
, qui aurait marqué, selon Jean Pache, « à cette inattendue disciple amitié et considération[3] ».
Après la publication de son récit, qui connaît un « grand succès en France » selon Giovanni Firmian[23][précision nécessaire], elle est invitée dans divers talk-shows français[5],[7],[24]
et accorde des interviews à propos du sado-masochisme[25],[26].
À l'occasion de la sortie d'une traduction de son livre en Italie, Giovanni Firmian décrit son auteure comme « la reine des dominatrices et des pratiques sado-masochistes, la plus célèbre de France, mais connue aussi dans le reste de l'Europe et aux États-Unis[23],[11] ». Mirella Serri dans La Stampa l'estime comme « une artiste appartenant à une espèce rare : les mystiques du sexe[8] ».
Ouvrage partiellement réédité en 2016 en version Kindle — sous le titre Françoise Maîtresse 2 — avec deux cents pages inédites assorties d'une préface de Jean Streff et d'une postface de Philippe Guénin (BNF45051874).
« Annick Foucault apparait pour la première fois en public et en direct dans l’émission de Christophe Dechavanne — Ciel mon mardi — en 1989. »
↑ a et b(it) Mirella Seri, « Il libro della «Maitresse» francese: Cure sadomaso per i mistici », La Stampa, no 90, , p. 20 (lire en ligne).
↑Monique Monique Ayoun, « Il m'a trompé avec moi-même », "Biba", no 200, .
↑(en) « The Maitresse », Skin Two(en), Londres, no 12, , p. 84
« Françoise is [...] an SM celebrity — one of France foremost dominants and a favourite of the media. »
↑ ab et c(it) « Annick Foucault raconta: come divenire dominatrice nel grande circo delle perversioni sadomasochiste », L'Europeo, , p. 65-66.
↑(en) « Moutet's Paris: Nice work if a former minister can get it », The European,
« [...] published by non other than the snooty Gallimard. »
↑ ab et cCéline du Chéné (préf. François Angelier, recueil de chroniques radiophoniques diffusées sur France Culture dans l'émission Mauvais genres de 2012 à 2016), « K comme képi : Maîtresse Françoise », dans L'encyclopédie pratique des mauvais genres, Paris, Nada, (ISBN9791092457223, BNF45388766), p. 75-79.
« Annick Foucault [...] se confesse et catalogue ses amants [...] selon leurs désirs les plus intimes ou leurs spécialités — elle a déclaré qu'ils avaient été ravis de se rencontrer couchés sur le papier. »
« Comme aime à dire Françoise, autre, avec toi, célèbre domina parisienne: "En érotisant la barbarie, les fétichistes et sadomasochistes castrent les vrais bourreaux de leurs armes." Et Michel Foucault, qui ne s'est jamais caché de ses goûts, de préciser: "On peut dire que le SM est l'érotisation du pouvoir, l'érotisation de rapports stratégiques." »
Voir aussi: Jean Streff, Traité du fétichisme : à l'usage des jeunes générations, Denoël, ([1]), p. 443
↑(en) Charles J. Stivale (Web resources), Deleuze and Guattari [« Recensement des textes et liens internet en rapport avec Gilles Deleuze »], Wayne State University, (lire en ligne), Diverse essays and links
« Annick Foucault, “Homage to Gilles Deleuze”: a fascinating and perceptive reflection on Deleuze's Venus in Furs and on his relations to sado-masochism by Annick Foucault, author of Maîtresse Françoise, ed. Collection Digraphe – Mercure de France. »
↑ a et b(it) Giovanni Firmian, « Il sadomasochismo di Françoise Maîtresse: l'amore ? È un gatto a nove code » [« Le sado-masochisme de Françoise Maîtresse : l’amour ? c’est un chat à neuf queues »], Amica(it), , p. 90-91.
↑François Angelier, Mauvais genres, France Culture, (écouter en ligne), « Week end Mauvais-genres : Les femmes fatales (rencontre avec Hélène Fillières), lauréats du prix Mauvais Genres 2013 » [audio]
Maîtresse Françoise est interviewée par Céline du Chéné. Émission préparée par Claire Martin du Gard et Pascale Dassibat. Réalisation de Laurent Paulré avec la collaboration de Jean-Baptiste Thoret, Philippe Rouyer, Céline du Chéné et Christophe Bier.
↑Voir la revue Digraphe no 70 (photo et texte Bruits d'Avila), septembre 94, et no 78 « la Mort de Paris VIII » (texte "Théâtre" Boudot), automne 96.
Anne Larue, Le masochisme ou comment ne pas devenir un suicidé de la société, Éditions Talus d’approche, coll. « Libre choix » (no 18), , 200 p., (OCLC491577674 et 1010208339) (ISBN2-87246-091-8 et 9782872460915, lire en ligne [PDF]), 1. La piste des châteaux. Masochisme et roman gothique — 7. La littérature enfantine et la résistance masochiste, pp. 22, 90, 129-133.
Jean-Jacques Pauvert (autre titre : « De l'infini au zéro »), Anthologie historique des lectures érotiques, 1985-2000, de l'infini au zéro, t. 5, Stock, , il s'agit du 5e et dernier volume de cette anthologie (ISBN2-234-05379-X et 9782234053793, OCLC47743578, BNF37583246), « Françoise Maîtresse / Annick Foucault ».