Le Salon des arts ménagers (SAM) était un salon annuel présentant à Paris les innovations en matière d’habitation et d’équipement. Créé en 1923, il a connu un record de fréquentation au milieu des années 1950 et a disparu en 1983.
Historique du Salon
La recherche et l’invention (1923-1939)
Près de vingt ans après l'ouverture de la Foire de Paris, Jules-Louis Breton, sous-secrétaire d'État des inventions pendant la Première Guerre mondiale, ouvre en octobre 1923[1], dans un baraquement sur le Champ-de-Mars, le « Salon des appareils ménagers » consacré aux dernières inventions et aux recherches en cours[2]. La première édition accueille 200 exposants et récompense créateurs de fours électriques, d'allumoirs à gaz, de boîtes à ordures, etc[1]. Son succès conduit à une installation au Grand Palais à partir de 1926[2] — il est alors intitulé « Salon des arts ménagers.
De 1934 à 1939, Jules-Louis Breton confie à son fils, Paul Breton, ingénieur des arts et métiers, l'organisation d'une importante section consacrée à l'architecture et à son équipement : l'« Exposition de l'habitation ».
La reconstruction et l'habitation (1945-1955)
Après le décès de son père, face à l’urgence de la situation en 1945, Paul Breton se voit confier par le ministre de la Reconstruction trois expositions consacrées au relogement des sinistrés : « Première Exposition de la Reconstruction » (1945), « Exposition des techniques américaines » (1946), « Exposition internationale de l’urbanisme et de l’habitation » (1947).
L’exposition internationale de 1947 — où sont présentés les principaux projets de reconstruction en France et en Europe — donne le ton de la réouverture prochaine du Salon des arts ménagers (17e), également dirigée par Paul Breton : l’innovation se recentre définitivement sur la question de l’habitation. Partant de l’architecture pour arriver aux plus petits équipements, le mobilier prend une place prépondérante, notamment dans la section du « Foyer d’Aujourd’hui » à partir de 1948, sous la direction de Jean Fressinet et de René Gabriel qui cherchent des meubles de série à la fois « modernes » et financièrement accessibles. Cependant, le taux d’équipement des ménages reste très faible et, plus qu’un accès à l’achat, le salon veut alors jouer un rôle d’apprentissage et d’éducation pour orienter l’investissement des ménages[3].
Haut-lieu de la consommation (1955-1960)
À partir de 1954-1955, le redressement économique de la France et la diffusion du prêt à la consommation permettent un réel accès aux « produits » promus par le salon. Celui-ci connaît alors son âge d’or, avec une fréquentation dépassant largement le million de visiteurs.
Son objectif est ainsi défini dans le catalogue de 1956 :
« Le Salon des arts ménagers n’est pas issu du jeu des intérêts privés. Créé sur l’initiative d’un haut fonctionnaire de l’État, loin de devenir une entreprise particulière, il est demeuré la propriété du Centre national de la recherche scientifique, établissement public du Ministère de l’éducation nationale. Diffusant l’enseignement propre à assurer en France le bonheur familial dans le foyer rénové, il sert actuellement la prospérité générale, suscitant […] l’essor des industries comme le développement du commerce et participe, en outre par sa contribution annuelle, au succès des travaux les plus élevés de la science […] »
Si ces principes retracent l’état d’esprit originel, il faut reconnaître que la vue de la grande nef consacrée aux appareils ménagers va devenir le symbole de la société de consommation. Cependant, en marge des mâts publicitaires lumineux des grandes marques, le rêve et l’utopie ont toujours leur place : par exemple, en 1956 dans la présentation de la Maison tout en plastique[4] (René Coulon et Lionel Schein, architectes ; Alain Richard décorateur ; Raymond Camus, constructeur), ou dans les objets du quotidien, comme dans le stand Formes utiles. D’un autre côté, la seconde moitié des années 1950 introduit également l’idée de mode : l’achat n’est plus seulement utilitaire et destiné à durer, l'objet devient « consommable » s'appuyant désormais sur un renouvellement esthétique et des couleurs plus attrayantes…
Vers un évènement professionnel (1961-1983)
En 1961, le Salon quitte le Grand Palais pour s’installer au Centre des nouvelles industries et technologies (CNIT). Alors que les années 1960 correspondent à l’apogée des Trente Glorieuses et à l’investissement d’une majorité des ménages dans un équipement lourd (réfrigérateur, lave-linge, téléviseur), le salon des arts ménagers connaît le début de son déclin : les magasins se multiplient dans toutes les villes de France et il n’est plus donc utile d’aller à Paris pour découvrir des nouveautés — qui n’en sont plus vraiment. Ce sont désormais les représentants ou les commerçants des « maisons de cadeaux » ou d’« électroménager » qui effectuent le déplacement pour sélectionner leurs produits. Le dernier Salon a lieu en 1983, il est ensuite remplacé par le Salon de l'équipement domestique (PROMODO). Réservé aux professionnels, il a lieu au parc des Expositions de Villepinte[5].
Association arts ménagers
L’Association arts ménagers (AAM)[6] a été créée en 1984, au lendemain du dernier Salon des arts ménagers ouvert au public. C'est une initiative d'Hervé de Looze et des membres du Comité d'organisation du Salon (dont Jacques Rouaud, commissaire général) et des rédacteurs de la Revue Arts Ménagers. Jean Fourastié était président d’honneur lors de la fondation de l'association. L'AAM souhaite prolonger les activités du Salon dans ses missions d'information et de mémoire en associant créateurs, industriels, techniciens, journalistes et consommateurs.
Après diverses tentatives d’implantation, l’Association s'est rattachée à Saint-Étienne Métropole en 2001, sur l’initiative d’Anne-Marie Sargueil, présidente de l’Institut français du design (IFD). L'AAM a organisé les expositions suivantes :
2002 : Biennale de design de 2002, « C’était comment il y a 50 ans » ;
2004 : musée d’Art moderne de Saint-Étienne, « Formes Utiles » ;
2006 : « Jours de Lessive. Histoire du lavage du linge et prospectives », avec notamment l'université Jean Monnet de Saint-Étienne ;
2007 : « Cultivons notre patrimoine quotidien », avec notamment l'université Jean Monnet de Saint-Étienne ;
2008 : « La Bartassaille dans tous ses états, regards croisés sur l’ustensile de cuisine », avec notamment l'université Jean Monnet de Saint-Étienne.
↑Claire Leymonerie, « Le Salon des arts ménagers dans les années 1950 » in : Sophie Chauveau, « Consommer en masse », Vingtième Siècle revue d’histoire, juillet-.
↑ a et bHuguette Meunier, « Soixante ans d'arts ménagers », L'Histoire, no 493, , p. 106-107 (lire en ligne)