Georges, Édouard Friboulet est né au Havre dans le département de la Seine-Inférieure, le [2],[3],[4] où ses parents se sont mariés trois ans plus tôt, le [5]. Son père, Georges Léonce Friboulet (1880-1948), employé de commerce, est originaire d'Octeville-sur-Mer d'une famille de cultivateurs laitiers et sa mère, Hélène Marie Lamotte (1886-1977), couturière, de Rochefort-sur-Mer dans le département de la Charente-Inférieure, est la fille d'un ébéniste des chantiers navals. De cette union est né un premier fils, Roger Friboulet, le [6].
En 1912, la famille déménage pour Yvetot et achète un commerce de chaussures avec son logement situé au-dessus, place de l'Hôtel de Ville[4]. Deux ans plus tard, la Première Guerre mondiale éclate[7]. Le père est mobilisé pendant toute la durée du conflit et accède au grade de caporal dans le 24e régiment d'infanterie territoriale[8]. Il revient donc à la mère de gérer foyer et magasin, lourde tâche qu'elle mène à bien[9].
La carrière artistique
Passionné de musique, il suit des cours privés en 1924, achète des partitions et apprend le piano. Ses premières influences musicales sont les œuvres de Charles Gounod, Camille Saint-Saëns et Jules Massenet. Autre passion du jeune artiste, la littérature et la poésie. Ses parents l'encouragent dans cette voie et décident de sa formation musicale. Il devient en 1926 élève à la maîtrise Saint-Evode de la cathédrale de Rouen et il a pour professeur, Henri Beaucamp, titulaire des orgues de la cathédrale de Rouen et père d'Albert Beaucamp. La même année avec des amis musiciens, il dirige un orchestre, dénommé Géo-Jazz, dans un bal à Yvetot et qui emporte l'adhésion du public[4].
Alors âgé de 18 ans, Georges Friboulet entre en 1928 au Conservatoire national supérieur de musique et de déclamation[10] où il suit les enseignements de Georges Caussade, de Raymond Pech et d'Henri Büsser[11]. Il obtient successivement, le Prix Halphen d'harmonie et de fugue en 1932 et 1933, le premier prix d'harmonie en 1934[12] puis le premier prix de fugue en 1935. Cette dernière année est prolifique pour Georges avec la création de sa première œuvre musicale : Cantilène pour flûte, suivi en 1936 de Divertissement pour flûte et cordes, Ouverture symphonique et La Petite Harpe. Il devient professeur suppléant de la classe d'harmonie de Raymond Pech, de 1933 à 1942[13]. Mais surtout, Georges Friboulet est admis au concours d'essai du Prix de Rome à Fontainebleau, le et reçoit la distinction du 1er accessit de composition musicale, en 1938. Son frère Roger quant à lui, se destine à reprendre le commerce familial à Yvetot et épouse dans cette même commune, Raymonde Marie Hélène Liberprey, le .
Georges Friboulet est démobilisé en et reprend son poste de suppléant dans sa classe d'harmonie à la réouverture du Conservatoire de Paris au mois de septembre suivant. Le voici membre des jurys d'examens et concours d'harmonie et de fugue à ce même Conservatoire, de 1942 à 1944[13]. Georges Friboulet épouse Fabienne Henrard à Paris, le dans le 5e arrondissement[4]. De cette union sont nés deux garçons, Jean-Édouard le et Michel le . Après-guerre, Friboulet s'intéresse aussi au cinéma en composant des musiques de documentaires : Images du Pays basque (1947) et La Vallée d’Aoste (1949). Il élabore l'orchestration des films : La Danseuse de Marrakech (1949), Monsieur Menu (1950) et Sérénade au bourreau (1951) avec son ami Marcel Landowski[4]. Ces œuvres sont signées sous le pseudonyme de Jean Daco, nom emprunté à l'arrière-grand-père de son épouse Fabienne Henrard[16]. Dans le domaine de l'orchestration et de l'harmonisation, il travaille aussi pour des artistes de la chanson : Édith Piaf, Tino Rossi ou Henri Salvador[4].
Son vœu de diriger une école de musique se concrétise avec sa nomination au poste de directeur du Conservatoire de musique, de déclamation et de danse de Casablanca au Maroc[10]. M. et Mme Friboulet sont reçus au Maroc le par les responsables de la municipalité et des Beaux-arts dont l'oncle de Fabienne, le peintre Félix Bellenot[17],[note 1]. Sa nouvelle fonction prend effet au et Fabienne devient professeur de piano dans ce même Conservatoire. Georges Friboulet a sous sa responsabilité 28 professeurs et 1 200 élèves. Période féconde pour le compositeur avec principalement la création en 1952, de cinq chœurs à cappella : Fable, La fille qui avait toujours froid, Le Colporteur, Un beau matin, Berceuse corse. En 1953, Gaminerie pour trompette et piano. En 1954, Messe en ré pour orchestre, chœurs, soli et orgue, créée en l’église du Sacré-Cœur de Casablanca. En 1955, Prélude pour Fabienne pour piano. En 1956, Les Sept jours de la semaine pour piano et en 1957, Prélude chromatique (se reporter au chapitre détaillé : Œuvres). Son action au sein de l'établissement est couronnée de succès avec une hausse significative des effectifs : 35 professeurs, 1 300 élèves répartis dans 25 classes dont une consacrée à la musique arabe. Enfin à son actif, la création de l’orchestre et de la chorale du Conservatoire.
Mais sa réussite lui vaut des inimitiés et des jalousies dans son entourage professionnel. En vacances à Megève en Haute-Savoie, il apprend le par une notification, que son contrat n'est pas reconduit. Pour Georges Friboulet, c'est la consternation[note 2]. Fabienne Friboulet de par son affectation à Casablanca, repart au Maroc à la fin du mois de avec ses deux enfants. Cette séparation qui perdure, a fini par avoir raison du couple et elle pense à une procédure de divorce dès 1959. L'année suivante, Fabienne est également nommée au Conservatoire de Rabat et après un second mariage à Casablanca le avec Victor Bessis, elle prend sa retraite en 1972 et revient en France par la suite. Pour vivre, Georges est obligé de travailler le jour comme employé aux écritures au ministère de l'Éducation Nationale et la nuit, comme pianiste de variétés au cabaret des Capucines. Les déconvenues se succèdent de par les échecs successifs à toutes ses candidatures pour des postes de directeur en province.
Georges Friboulet reçoit le Prix Henri Rabaud au mois d'. La même année, son frère Roger disparaît à l'âge de cinquante ans, le à Lourdes. Enfin l'espoir renaît grâce à l'appui de Raymond Gallois-Montbrun et Marcel Landowski. Le , Georges devient assistant technique aux Études musicales du Conservatoire de Paris[18], aux côtés du directeur Raymond Gallois-Montbrun, jusqu'en 1978.
Les dernières années
Georges Friboulet continue de recevoir maintes récompenses dont celle de Chevalier des Palmes académiques en 1956 et il est médaillé d'argent du Mérite civique en 1957. Il accède successivement à la fonction de secrétaire général des Amis du Conservatoire en 1965 et secrétaire définitif de la Sacem en 1966.
Le compositeur prend sa retraite en 1978 et se retire en fin de vie à Morsang-sur-Orge dans le département de l'Essonne avec sa nouvelle compagne, une ancienne élève de Casablanca. Mais celle-ci l'éloigne de son milieu musical et elle finit par lui enlever toute envie de création artistique, sa raison même de vivre[19]. Pressentant sa fin proche, il confie à son fils aîné : « j'ai peu écrit, mais j'ai tout écrit »[4]. Il résume par ces quelques mots, l'originalité et la préciosité de sa musique, sa non-appartenance à quelque école. Âgé de 81 ans, Georges Friboulet meurt le à l'hôpital d'Athis-Mons[20],[4]. Ultime reconnaissance, la Bibliothèque nationale de France accepte en 2006, le don de ses archives personnelles : œuvres manuscrites, écrits, correspondance et photographies.
Œuvres
Vocales et instrumentales
1929 : Pensée lointaine, Gondole errante, Les roses du soir, Des feuilles tombent, Prélude vénitien. Premières œuvres pour piano éditées chez Veraeghen à Rouen.
1930 : La belle Aude, cantate pour orchestre, chœurs et soli.
1936 : Trio pour violon, violoncelle et piano. Créé pour le concours d'essai du Prix de Rome et interprété à Fontainebleau par Raymond Gallois-Montbrun, Jacques Nelse et Pierre Sancan. Le manuscrit est détruit à Yvetot en 1940 au début de la Seconde Guerre mondiale.
1966 à 1977 : Neuf recueils pour piano édités au cours de cette période, 14 pièces pour le piano, Le cahier de Maryse, Le cahier de Fabienne, Gestes et sentiments, Pour passer le temps, Le Pré-aux-Loups, Le Troglodyte, La petite famille, et Nous.
1977 : La Goélette, pour piano et quatre voix mixtes.
Concerts
et : Cirque de Rouen. Programmes des concerts imprimés par les éditions Lecerf à Rouen.
: Diffusion à la radio de la Berceuse pour l'enfant brune, œuvre pour orchestre, Radio Paris.
: Œuvres orchestrales exécutées au Salon d'automne, Palais de Tokyo, Paris.
et : Œuvres musique de chambre exécutées Salle Gaveau, Paris.
: Première audition du Motet au Christ-Roi, inauguration du Sacré-Cœur de Casablanca.
: Première audition de la Messe en Ré, inauguration de l'église Saint-Paul de Bourgogne, Casablanca.
1951 à 1957 : Toutes les œuvres chorales, instrumentales et orchestrales composées au cours de cette période, sont exécutées au Théâtre de Casablanca et à Radio Maroc.
: Diffusion à la radio de la Suite sans fin, orchestre de la RTF, France Musique.
Cinéma
Musiques de films, sous le pseudonyme Jean Daco :
1947 : Images du Pays basque, court-métrage. Réalisation Yvette Auroy, Atlantic film, production SDAC, archives BNF et CNC.
1949 : La danseuse de Marrakech, long métrage, réalisation Léon Mathot et sous la direction musicale de José Padilla Sánchez, 1949, archives CNC.
1949 : La vallée d'Aoste, court-métrage, production Roger Chouquer, 1949, archives CNC.
1950 : Monsieur Menu, court-métrage avec Maurice Bourbon, réalisation Jean Loubigne, production Codo Cinéma, 1950.
1951 : Sérénade au bourreau, réalisation Jean Stelli et sous la direction musicale de son ami Marcel Landowski, production Codo Cinéma, 1951.
La nomination de Georges Friboulet à Casablanca le a mis court à ses débuts prometteurs dans la composition musicale de films et de chansons notamment : Loin de mon pays, Fleur des Antilles, La valse créole, Kalalou Gombo, archives BNF.
Georges Friboulet (préf. Manuel Rosenthal), Technique de l'harmonie du jazz (partition musicale imprimée), Paris, Éditions Salabert, , 120 p.
Georges Friboulet, Vingt-quatre leçons d'harmonie : douze chants donnés dans le mode majeur et douze chants donnés dans le mode mineur, Paris, Éditions Alphonse Leduc,
Georges Friboulet est critique musical dans les revues Artistes et écrivains normands (1934-1935) et dans Arts et Idées (1937-1939) :
Georges Friboulet, La musique : Écrits sur la musique, Paris, « s.n. », éditeur non connu, coll. « Arts et idées » (no 11), , 40 p. (ISSN2022-5083, lire en ligne), p. 34 à 35
Le samedi , le Cercle d'étude du patrimoine cauchois organise une conférence sur « Georges Friboulet, un compositeur yvetotais », au Conservatoire Fernand-Boitard à Yvetot[13].
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Ouvrages
Jean-Édouard Friboulet, Georges Friboulet (1910-1992) : un compositeur yvetotais (Biographie), Yvetot, Éditions du Cercle d'études du patrimoine cauchois, coll. « La Gazette du patrimoine cauchois » (no 39), , 32 p. (ISSN1255-5576).
Jean-Édouard Friboulet, « Georges Friboulet (1910-1992) », Musica et Memoria, Rioux, Éditions de l'Association Élisabeth et Joachim Havard de la Montagne, (lire en ligne)
Maroc Monde, « Le conservatoire de Casablanca est devenu un des meilleurs », Maroc Monde, Casablanca,
James Kivani (interview de Georges Friboulet), « Modernisation et renaissance de la musique andalouse », Maroc Demain, Casablanca, , p. 1 et 5
Georges Friboulet, « De l'harmonie dans la chanson moderne », Revue Musique et Radio, Paris, no 477, , couverture et suite
Le Petit Parisien (supplément pages Normandie), « Le compositeur Georges Friboulet nous parle de ses inspirations normandes », Le Petit Parisien, Paris,
↑Le site Musica et Memoria en précise les raisons : « en mars 1957, à la suite d'une démission forcée d'un membre du personnel administratif et des ambitions personnelles d'un enseignant, une campagne de calomnies envers Georges Friboulet se met en place ». Mais cette campagne perdure l'année suivante : « en mai 1958 plusieurs lettres anonymes sont envoyées du Maroc à des personnalités de Paris. Sans doute ont-elles été écrites par ceux qui avaient précédemment réussi à son éviction du Conservatoire de Casablanca en utilisant les mêmes procédés déloyaux. Manœuvrant à distance, visiblement animés par une haine tenace, forts de leurs relations, ils l’empêchent ainsi de se reclasser en métropole ». Source : Jean-Édouard Friboulet, « Georges Friboulet (1910-1992) », Musica et Memoria, Rioux, Éditions de l'Association Élisabeth et Joachim Havard de la Montagne, (lire en ligne)
↑Archives municipales du Havre : État civil - acte de naissance no 2174. Archives municipales du Havre, Fort de Tourneville, no 55 rue du 329e Régiment d'Infanterie 76620 Le Havre.
↑Archives départementales de la Seine-Maritime : État civil du Havre - acte de naissance no 2174. Cote du document : no 4E 19961. Archives départementales de la Seine-Maritime, Hôtel du département, Quai Jean Moulin CS 56101, 76101 Rouen cedex.
↑ abcdefg et hJean-Édouard Friboulet, « Georges Friboulet (1910-1992) », Musica et Memoria, Rioux, Éditions de l'Association Élisabeth et Joachim Havard de la Montagne (site internet : Musimem.com), (lire en ligne).
↑Archives départementales de la Seine-Maritime : État civil du Havre - acte de mariage no 496. Cote du document : no 4E 19940. Archives départementales de la Seine-Maritime, Hôtel du département, Quai Jean Moulin CS 56101, 76101 Rouen cedex.
↑Archives départementales de la Seine-Maritime : État civil du Havre - acte de naissance no 604. Cote du document : no 4E 19944. Archives départementales de la Seine-Maritime, Hôtel du département, Quai Jean Moulin CS 56101, 76101 Rouen cedex.
↑Sa nièce est Martine Henrard (1945-2011), actrice, chanteuse, productrice française et plus connue sous son nom d'artiste, Martine Kelly.
↑Il s'agit de Jean Hubert Daco, natif de Samrée, La Roche-en-Ardenne en Belgique et époux de Marie Marguerite Goffard. Source : familles Henrard, étude généalogique et sociale, Belgique et France. Archives privées.
↑Jean-Édouard Friboulet, Georges Friboulet (1910-1992) : Un compositeur yvetotais (Biographie), Yvetot, Éditions du Cercle d'études du patrimoine cauchois, coll. « La Gazette du patrimoine cauchois » (no 39), , 32 p. (ISSN1255-5576)
↑Source : Conférence « Georges Friboulet, un compositeur yvetotais », le 10 novembre 2012. Entretien : Daniel Boitard, ancien directeur du Conservatoire d'Yvetot, et Jean-Édouard Friboulet.
↑Mairie d'Athis-Mons : État civil - acte de décès no 35. Mairie d'Athis-Mons, place du Général de Gaulle 91200 Athis-Mons.
↑À noter que le second prénom de Georges Friboulet transcrit dans l'ouvrage est erroné (Edmond). La même erreur se retrouve sous son pseudonyme, Jean Daco, à la page 466 du même volume. Il faut lire dans la colonne no 2 : Friboulet, Georges Édouard (1910).