Pionnier de l'ethnopsychiatrie, il a profondément marqué la psychiatrie française et celle du tiers-monde[2].
Longtemps en poste à Dakar, il est l'un des fondateurs d'une approche alors nouvelle de la psychiatrie consistant à prendre en compte les facteurs liés à la culture des patients et s'inscrivant en opposition avec la psychiatrie coloniale qui marquait son époque.
Biographie
«
Familier des tribus nomades, des rebelles, des contrebandiers, médecin particulier du Roi des rois en Ethiopie, chef du service de santé du corps expéditionnaire au Viêt-Nam, ce jeune médecin militaire est, avant tout, tourné vers l'Autre. Observateur des cultures et des traditions, ami de Senghor, d'Haïlé Sélassié et de Castro, il y a dans cet homme étonnant du Saint-John Perse, du Rimbaud et du Saint-Exupéry. (Robert Arnaut)[3] »
Famille
Henri Collomb est le fils de Célestin Marcelin Collomb (1877-1954), né à Valbonnais, cultivateur, et de Augustine Fege (1888-1976), ménagère, née à La Chapelle en Valjouffrey, mariés en 1911 à Valjouffrey[4].
Il se marie en 1944 à Addis-Abeba avec Lydie Fernande Lily Dietrich (1918-2003) puis en 1951 à Saïgon avec Madeleine Marie-Claire Simon. Il est le père de deux filles, Agnès et Laurence[5].
Carrière
Il passe sa jeunesse dans la commune de Valbonnais et suit ses études secondaires au Lycée de La Mure. Après avoir obtenu son baccalauréat, il effectue son année préparatoire de médecine (PCB) à Grenoble[4].
En janvier 1939, il est affecté à Djibouti, alors capitale de la Côte française des Somalis, comme médecin militaire mais sa plus grande occupation est celle de médecin pour la population[6]. En décembre 1942, il part pour l'Éthiopie et en février 1943, il devient médecin chef de l’empereur Haïlé Sélassié Ier[7].
Il rentre en France en juin 1948. Il passe ensuite le concours pour devenir psychiatre et est nommé spécialiste des hôpitaux coloniaux (section neuropsychiatrie) à Marseille en décembre. Il est affecté à l'enseignement à l'école du Pharo comme professeur agrégé de médecine et de neuropsychiatrie[8].
« Henri Collomb, professeur agrégé du Service de santé des troupes coloniale d'une haute valeur morale et d'un dévouement total, débarqué en Indochine le 2 février 1951, assure les importantes fonctions de médecin-consultant des forces terrestres d'Extrême-Orient. A ce titre, a été appelé à se rendre fréquemment en zone d'insécurité sur les différents théâtres d'opérations pour étudier les conditions sanitaires locales et faire prendre par les troupes en opération les mesures propres à préserver la santé des effectifs. Technicien de grande classe, aussi modeste qu'efficace, animé d'une foi ardente dans l'accomplissement de sa mission, il s'est rêvé un auxiliaire précieux pour le haut commandement et le corps expéditionnaire. « Cette citation comporte l'attribution de la croix de guerre des Théâtres d'opérations extérieures, avec étoile de vermeil. ». »
A son retour en France en octobre 1953, il devient psychiatre, neuropsychiatre à temps complet et travaille à Marseille jusqu'en 1958, notamment à l'hôpital Michel-Lévy[10].
Il devient en 1965 le premier titulaire de la chaire de neuropsychiatrie de la faculté de médecine[5].
Il reste au Sénégal durant vingt ans et développe un courant de pensée aux antipodes de la psychiatrie coloniale. En effet, Collomb, en rupture avec la pensée psychiatrique de son temps qui consiste à plaquer les conceptions de la psychiatrie et de la psychologie forgées en Europe sur les populations locales, cherche à comprendre les particularités du contexte sénégalais. Il se situe ainsi en rupture avec la psychiatrie coloniale. Pour ce faire, il s'entoure de chercheurs français et africains : psychiatres, psychologues, ethnologues, sociologues, psychanalystes, mais aussi de guérisseurs locaux[11].
Participeront à ce groupe Edmond Ortigues, Marie-Cécile Ortigues, Jacqueline Rabain et Andras Zempleni.
« Si la psychiatrie moderne s'enferme dans ses murs, elle se condamne à la réclusion et à l'impossibilité d'établir le contact entre le soignant, le soigné et son environnement. La psychiatrie moderne vivra alors de ses illusions, à coups de neuroleptiques et d'électrochocs, et découvrira, dans vingt ou trente ans, qu'elle n'a pas accompli le moindre progrès, alors que toute la médecine a avancé, en un mot, qu'elle n'a pas accompli sa mission[12]. »
En 1978, un an avant sa mort, il revient en France.
« De plus en plus, j’en suis sûr, l’on parlera de l’École de Dakar, de médecine négro-africaine. Et le nom du professeur Collomb y sera étroitement lié : ses vingt années de labeur à Dakar ont à jamais marqué la recherche médicale en Afrique. Car ce Français a su mourir aux préjugés les plus solidement établis. »
Henri Collomb repose à Valbonnais, dans le petit village des Alpes où il avait grandi.
Titres
1936 : interne des hôpitaux de Bordeaux
1949 : professeur agrégé de médecine générale, service de santé de la France d’outre-mer
1950 : médecin des hôpitaux psychiatriques
1958 : maitre de conférences agrégé de neuropsychiatrie
1965 : professeur titulaire de la chaire de neuropsychiatrie à la faculté de médecine et de pharmacie de Dakar
1979 : chef de service de psychiatrie au centre hospitalier et universitaire de Nice (hôpital Pasteur)
↑Robert Arnaut, La folie apprivoisée : L'approche unique du professeur Collomb pour traiter la folie, De Vecchi, Paris, 2006, 4e de couverture
↑ ab et c« Henri Collomb est né le 14 décembre 1913 à 2 heures du matin, en la Maison du Fege, dans la commune de Valjouffrey. Il était le fils de Célestin Marcellin Collomb, 36 ans, cultivateur, domicilié aux Moulins, commune de Valbonnais, et de Augustine Fege, 25 ans, ménagère. », Bulletin mensual de l'Académie delphinale, Académie delphinale, Grenoble, 1988, p.146
↑ a et bStéphane Boussat et Michel Boussat, « À propos de Henri Collomb (1913-1979) : De la psychiatrie coloniale à une psychiatrie sans frontières », L'autre, Cliniques, Cultures et Sociétés 2002;3(3):411-424
↑1966, cité par Arnaut R, La folie apprivoisée : L'approche unique du professeur Collomb pour traiter la folie, De Vecchi, Paris, 2006
↑« Au grade d'officier : ... M Collomb (Henri-Célestin-Marcellin), professeur titulaire de chaire, chef de service de neuropsychiatrie de la clinique neurologique de Fann à Dakar. Chevalier du 31 décembre 1958 », JORF, janvier 1972, p.46
↑« Collomb (Henri-Célestin-Marcellin), médecin lieutenant-colonel;
27 ans de services et majorations, 13 campagnes. Cité. », décret du 18 décembre 1958, JORF du 3 janvier 1959, p.204
↑« Par décision du ministre des armées en date du 14 août 1963, la médaille d'honneur du service de santé des armées est décernée aux personnes ci-après désignées ... Collomb (Henri), médecin colonel des troupes de marine . »,Bulletin Officiel des Decorations, Medailles et Recompenses, 1963, p.540
Bibliographie
Robert Arnaut, La folie apprivoisée : L'approche unique du professeur Collomb pour traiter la folie, De Vecchi, Paris, 2006 (ISBN978-2732883113).
Olivier Douville, Robert Arnaud : La folie apprivoisée, l'approche unique du professeur Collomb pour traiter la folie, Figures de la psychanalyse, vol. 15, no. 1, 2007, pp. 221-224
Stéphane Boussat et Michel Boussat, « À propos de Henri Collomb (1913-1979) : De la psychiatrie coloniale à une psychiatrie sans frontières », L'autre, Cliniques, Cultures et Sociétés 2002;3(3):411-424. résumé
Henri Collomb : professeur agrégé médecine, 1913-1979 : son œuvre, son humanité, Comité du souvenir de la personne et de l'œuvre d'Henri Collomb, Valbonnais, 1980, 62 p.
(en) Alice Bullard, « The critical impact of Frantz Fanon and Henri Collomb : Race, gender, and personality testing of north and West Africans », Journal of the history of the behavioral sciences, 2005, vol. 41, no 3, p. 225-248.