École du service de santé des armées de BordeauxÉcole du service de santé des armées de Bordeaux
L'École du service de santé des armées de Bordeaux, appelée Santé Navale et autrefois École principale du service de santé de la Marine, était une Grande École militaire qui formait jusqu'en 2011, comme son homologue à Bron, l'École du service de santé des armées de Lyon-Bron, des médecins destinés à servir au sein du Ministère de la Défense. Les « navalais » étaient amenés à exercer dans les établissements propres du Service, notamment les Hôpitaux d'Instruction des Armées, les centres de recherches et les Écoles du Service de Santé des Armées mais aussi et bien sûr au sein des formations de l'Armée de Terre, Armée de l'Air, Marine Nationale et Gendarmerie Nationale. L'École a fermé le . Au total, 9 150 élèves y ont été formés depuis 1890, dont 600 pharmaciens de 1890 à 1984 et 3 dentistes de 2002 à 2009. Sa mission a été reprise par l'École de santé des armées située à Bron (près de Lyon). SymboliqueL'insigne de l'école, rappelant la devise « Mari Transve Mare Hominibus Semper Prodesse » (« Sur mer et au-delà des mers, toujours au service des hommes »), porte au centre les armoiries de Bordeaux, l'ancre symbolisant la Marine et la rose des vents l'aventure coloniale. Le drapeau de l’École était jusqu’en 1998 un des 9 drapeaux de la Marine Nationale mais l’âge l’a rattrapé. Exposé jusqu'en 2011 dans la Salle du Souvenir, on pouvait y lire : « École Principale du Service de Santé de la Marine ». Le , un nouveau drapeau labellé « École du Service de Santé des Armées - Bordeaux » défile sur les Champs-Élysées. C'est lui qui a été remis le au directeur central du Service de santé des armées et replié, à l'occasion de la cérémonie de dissolution. Dans l'argot de la Marine nationale, l'École de santé navale de Bordeaux était appelée « La Navale » et ses élèves les « navalais ». Cette appellation est souvent attribuée à tort à l'École navale dont le surnom est « La Baille » et ses élèves, les « bordaches ». CréationC'est par le décret du que le principe d'une « école militaire du service de santé » a été adopté, s'appuyant sur la prospérité rapide du foyer scientifique local, les ressources du port maritime ainsi que les relations avec les colonies et l'étranger[1]. C’est le qu’est créée à Bordeaux l’« École principale du service de santé de la Marine ». Il existait depuis le XVIIIe siècle trois écoles de formation des médecins et pharmaciens de la Marine, à Rochefort, Brest et Toulon, mais ces ports n’étaient pas des villes universitaires ; or pour exercer la médecine, le doctorat était devenu obligatoire et seules les facultés étaient habilitées à le délivrer. Après d’âpres discussions, Bordeaux fut choisie de préférence à Marseille et Montpellier. Les trois Écoles des ports assureront la préparation du concours d'admission à l'EPSSMC jusque dans les années 1960 où le concours sera post-bac. L’École put commencer à fonctionner dès la fin de 1890, car elle fut implantée non loin de la Faculté de Médecine, cours Saint-Jean (cours de la Marne après la guerre de 1914), dans les bâtiments annexes de l’hôpital psychiatrique transféré à Château Picon (aujourd'hui CH Charles Perrens) ; de nouveaux bâtiments sont ensuite construits en 1897. Les élèves sont internes pendant leurs études ; ensuite les jeunes docteurs en médecine ou en pharmacie font, à partir de 1905, un stage à l’École du Pharo de Marseille avant de partir outre-mer. Au début du XXe siècle, les Navalais sont envoyés surtout en Extrême-Orient, en Indochine où ont été installés des Instituts Pasteur à Saïgon, Hué, Hanoï ; en 1933 une Faculté de Médecine sera créée dans cette dernière ville. Ils sont aussi présents en Chine, à Kunming, Shanghai, Tien-Tsin ; le Navalais qui deviendra le plus célèbre est Victor Segalen (promotion 1898), écrivain, poète, archéologue. D’autres partent pour Madagascar et en quelques années organisent un remarquable réseau sanitaire : en 1904, l’île compte déjà 21 hôpitaux, 7 léproseries, 28 dispensaires... L’Afrique centrale et occidentale s’ouvre un peu plus tard à l’influence de la médecine française ; en 1908, est ouvert l’Institut Pasteur de Brazzaville. De nombreux Navalais s’enfoncent dans la « brousse », où ils font preuve d’un admirable dévouement. Un lien très fort avec Bordeaux« Soyez également les bienvenus, Messieurs les Étudiants de la Marine. Vous trouverez toujours en nous des maîtres bienveillants. Nous savons que l'avenir vous réserve l'honneur de représenter dans les pays lointains la science française, si injustement dénigrée par des rivaux acharnés. Pour remplir dignement votre tâche, il faut que vous soyez plus que des médecins ordinaires. Il faut que, par la sûreté et l'étendue de vos connaissances, vous puissiez inspirer le respect et l'amour de la mère-patrie aux populations que vous irez visiter en émissaires de notre civilisation. Nous nous emploierons de notre mieux à vous préparer à cette noble mission ». Ces mots, prononcés lors de la séance de rentrée de 1890 par Albert Pitres, doyen de la toute jeune faculté de médecine de Bordeaux située à quelques centaines de mètres de l'École, illustrent bien le lien très fort qui existe entre l'École de Santé Navale et sa ville[non neutre]. La population bordelaise s'attache à la présence de l'École, qui sera surnommée familièrement « Santé Navale » par les Bordelais, ses élèves étant connus sous le qualificatif « navalais » (l'appellation « navalais » est souvent utilisée à tort pour les élèves de l'École navale, les « bordaches »). Rapidement se développent également de nombreux liens avec le monde hospitalo-universitaire bordelais : de nombreux navalais réussissent les concours de l'externat et de l'internat (cinq navalais sur les sept postes ouverts en 1927), s'intégrant ainsi au réseau hospitalier tandis que d'autres accèdent à des responsabilités universitaires au sein de la faculté de médecine et de pharmacie où près de 30 seront professeurs. Ces liens se poursuivront jusqu'à nos jours, où quelques chefs de service du CHU sont d'anciens navalais. L'Université, qui porte le nom d'un Ancien, Victor Segalen, a été présidée de 1987 à 1992 par un autre Ancien, le professeur Dominique Ducassou (Promotion 1962) et la faculté de médecine eut notamment comme doyen Georges Portmann (Promotion 1910). Ce dernier sera également élu sénateur de la Gironde. Parmi les autres grands noms de la faculté bordelaise on peut notamment citer Jacques Leng-Lévy (Promotion 1927), Albert Rigaud (Promotion 1926) ou encore René Maurice Babin (Promotion 1926). La chaire de médecine tropicale, la première ouverte en France, est révélatrice de ce lien très étroit entre l'École et la faculté. Son premier titulaire sera Alexandre Le Dantec, répétiteur à l'École dès 1890, chargé de conférences à la faculté en 1895, il accède à l'agrégation en 1902. Il est considéré en France comme l'un des grands fondateurs de la médecine tropicale et de la pathologie exotique. Sa chaire fut reprise en 1928 par le Professeur Bonnin, en 1956 par Gaston Moretti (Promotion 1934) puis Michel Le Bras (Promotion 1957). En 1988, l'Institut bordelais de médecine tropicale fut baptisé du nom de René Labusquière (Promotion 1939). L'œuvre colonialeLa guerre de 1914-18 interrompt ces douces années de la genèse. Les élèves rejoignent leurs Anciens dans leurs postes sur mer ou au sein des régiments des troupes coloniales et de fusiliers marins tandis que l'École accueille un hôpital. Au sortir du conflit, 76 Navalais manquent à l'appel, les survivants peuvent s'enorgueillir de 350 citations et 13 Légions d'Honneur. L’expansion reprend à partir de 1925 et l’Afrique est désormais la principale destination des jeunes médecins : en 1938, on compte 165 « médecins et pharmaciens militaires coloniaux » en A.O.F. et 86 en A.E.F. ; la plupart appartiennent aux troupes de marine et sont passés par l’École de Bordeaux. Ils organisent une lutte systématique contre les grandes endémies, la maladie du sommeil pour laquelle il faut traiter des centaines de milliers de malades en quelques décennies, l’onchocercose, la « cécité des rivières » détectée systématiquement par les « capitaines moustique », la peste à Madagascar, la lèpre à Bamako, la fièvre jaune à Dakar. Ils créent des Écoles de Médecine à Dakar et à Tananarive. 1939, de nouveau la guerre. L’École, après une tentative avortée de ralliement à l'Afrique du Nord marquée notamment par l'immersion du drapeau dans la Garonne, se replie à Montpellier et ne retrouve Bordeaux qu'en 1943, ses locaux à la Libération. Les pertes sont lourdes : 66 Navalais ou anciens Navalais sont morts au champ d’honneur en 1939-45 et 36 autres perdent la vie dans les guerres d’Indochine et d’Algérie. En Afrique Noire, ces « militaires travaillant le plus souvent dans des structures civiles de santé » poursuivent leur œuvre. Des Facultés de Médecine sont créées à Dakar en 1949, à Abidjan en 1963 et, sauf en Guinée, l’indépendance n’entrave pas la poursuite de leur activité. En 1978, le Président Houphouët-Boigny, médecin formé à Dakar, écrit : « Je garde une indéfectible reconnaissance à l’École de Médecine de Dakar et à ses maîtres qui étaient… des Officiers du Service de Santé d’Outre-mer qui ont œuvré avec tant de courage et de dévouement au service des populations d’Afrique Noire ». Pour maintenir la cohérence des actions entreprises malgré le morcellement des nouveaux États indépendants, des organisations inter-étatiques furent créées, l’OCCGE à Bobo-Dioulasso dès 1960, l’OCEAC à Yaoundé en 1965, sous l’impulsion de deux anciens Navalais, Pierre Richet et René Labusquière. Dans les années 1970, 10 nouvelles écoles de médecine sont créées avec l’aide de médecins navalais, qui progressivement ont été relayés par des médecins africains. En , 330 officiers français du Service de Santé, pour la plupart des Navalais, étaient en poste outre-mer. Il n’y en a plus guère en brousse et leur action se fait sentir surtout dans les grands hôpitaux et l’enseignement universitaire, en Afrique Noire, mais aussi à Antananarivo, à Pondichéry, dans les DOM-TOM. Au bilan, outre l'éradication de nombreux foyers endémiques, les navalais du corps de santé colonial furent à l'origine de la création de 14 Instituts Pasteur, 2 facultés et 4 écoles de médecine, 24 écoles d'infirmiers et de sages-femmes et des centaines d'hôpitaux
— Professeur Maurice Payet, premier doyen civil de la Faculté mixte de médecine et de pharmacie de Dakar Les menaces des années 1980En 1971, le gouvernement décida de réorganiser les services de santé militaires. Il fut créé une seule « École du Service de Santé des Armées », divisée en deux établissements situés à Bordeaux et à Lyon, avec des statuts et un fonctionnement identiques. Il fut ensuite question de transférer l’École du cours de la Marne à la périphérie de la ville, à Mérignac ; le projet, trop coûteux, fut abandonné en 1981. Plus grave fut à cette époque, M. Barre étant Premier Ministre, l’annonce de la disparition de l’École de Bordeaux et le maintien d’une seule école, celle de Lyon : les manifestations des Bordelais, très attachés à leur « Santé Navale » et l’intervention de Jacques Chaban-Delmas amenèrent le nouveau gouvernement à annuler cette décision en . L'École de Bordeaux put donc poursuivre sereinement sa mission de formation des jeunes médecins militaires. La finLe , la nouvelle est officielle et fait la « Une » du grand quotidien régional Sud Ouest, l'École de Santé Navale fermera ses portes le . En effet, elle fait partie des formations touchées par la grande réforme des Armées consécutive à la publication du Livre Blanc de la Défense Nationale et à la Réforme Générale des Politiques Publiques. Par conséquent, les plus jeunes promotions sont transférées sur l'ESSA de Lyon-Bron tandis que celles encore en cours au moment de l'annonce terminent leur cursus à Bordeaux. La dernière grande cérémonie a lieu dans les murs de l'École le et est l'occasion de réunir près de 3 000 personnes pour le baptême de la dernière promotion de navalais, la 2008, qui prend le nom de promotion « Santé Navale ». Le le drapeau de l'École flotte pour la dernière fois sur les Champs-Élysées et reçoit les honneurs de la République en défilant sur la plus belle avenue du monde. Le , le Médecin Général des Armées Gérard Nedellec, Directeur Central du Service de Santé des Armées, a présidé la cérémonie de dissolution de l'École de Santé Navale, en présence du Ministre d’État, ministre des Affaires étrangères et européennes et maire de Bordeaux, monsieur Alain Juppé. Les élèves ont ainsi pu rendre hommage pour la dernière fois à leur Drapeau au sein de leur École, avant que celui-ci ne rejoigne la salle du souvenir de la nouvelle École de Santé des Armées de Bron. La fermeture administrative a lieu le en même temps que l'École de Lyon-Bron, qui voit sur son site la création de la nouvelle École de santé des armées (ESA) le . Ainsi disparait une institution bordelaise âgée de 121 ans. Le site de BordeauxLe site de l'école de Bordeaux était un ancien asile d'aliénés dont elle a conservé certains bâtiments. L'entrée est située au 149 bis Cours de la Marne, sur le côté du bâtiment principal via le passage d'un poste de garde ou « aubette » dans le jargon traditionnel de la Marine. Cette entrée est sur l'emplacement de l'ancien tracé du Cours Barbey (avant l'extension de l'École en 1966). La route pour pénétrer dans l'École et plus particulièrement la cour d'honneur est, elle, à la place de « la porte du général », lieu de passage nocturne pour des générations de navalais. L'entrée jusque dans les années 1990 était au 147 du Cours de la Marne (Cours Saint-Jean avant la Grande Guerre) par une vaste porte latérale du bâtiment commandement. Construit en 1893, sa façade est très richement décorée et porte les attributs de la médecine navale et de la ville de Bordeaux. En son sein on retrouve les bureaux de la « Strasse » (ou administration) et les appartements privés de l'État-Major de l'École. La cour d'honneur est donc délimitée par le bâtiment commandement, le mur d'enceinte originel percé qui est devenu l'entrée principale, le bâtiment des communs et l'allée de l'artillerie qui permet d'accéder au reste de l'École. Elle est le lieu des commémorations puisque c'est là que sont implantés le monument aux morts et une Ancre de Marine, symbole traditionnel dans les unités de la Marine Nationale. Le bâtiment des communs est un des vestiges de l'École initiale et de l'asile. Ancien bâtiment des sœurs il fut doté d'un garage par les Allemands durant l'occupation. On y retrouve des bureaux administratifs, le self, des logements pour les cadres, la chapelle (ancienne salle d'armes), la salle d'honneur et l'infirmerie. Ce bâtiment est un des plus anciens de l'École (XVIIIe siècle). L'allée de l'artillerie, autrefois pavée, mène à la vaste cour des élèves par un virage qui longe le bâtiment des études ou tout droit dans la cour des laboratoires, en passant sous la monumentale porte vestige du dépôt royal de mendicité. La cour des laboratoires, seule restante d'une des nombreuses cours de l'ancien asile, est un rectangle dont les côtés sont composés par le bâtiment des études, le bâtiment des élèves, les laboratoires et la porte royale. Les trois anciens laboratoires de parasitologie et de bactériologie de l'École sont maintenant des salles de cours. Ce long bâtiment qui longe le lycée Gustave-Eiffel comporte également un amphithéâtre, baptisé du nom de Jacques Chaban-Delmas. La cour des élèves est la place d'armes de l'École. Jusque dans les années 1950 elle était en terre et recouverte de très nombreux arbres. Depuis elle a été goudronnée et les arbres sont moins nombreux. Bâti en 1893 et surélevé de deux étages en 1925, le bâtiment « Ferbos » (du nom de la rue qui le longe) est le bâtiment de logement principal des élèves. Il est situé à l'ouest de la cour. Sur sa façade sont apposés les plaques « Honneur, Patrie, Valeur, Discipline » que l'on retrouve sur tous les bâtiments de la Marine Nationale. Le mât des couleurs, d'architecture typiquement « Marine », est lui aussi accolé à Ferbos. Côté Nord, le bâtiment des études comporte des bureaux du commandement, la bibliothèque et le logement de l'aumônier. Dortoir des élèves jusqu'à la création de Ferbos, ce bâtiment est lui aussi un vestige de l'ancien asile. Jusqu'en 1966, le sud de la place d'armes était barré par un mur d'enceinte, qui longeait alors le Cours Barbey. Devant l'augmentation du nombre d'élèves, le bâtiment « Barbey » est construit en 1966. Pour cela, le mur d'enceinte est abattu (on en voit cependant des restes le long du collège Aliénor d'Aquitaine) et le cours Barbey retracé. Notons enfin que, malgré leur âge pour certains et leur qualité architecturale pour d'autres, aucun des bâtiments de l'École de Santé Navale n'est inscrit à l'inventaire des Monuments Historiques. Citations à l'ordre de l'ArméeDes navalais ont combattu dans le monde entier durant les conflits auxquels la France a participé tout au long du vingtième siècle. Pour récompenser le sacrifice et le dévouement de ces élèves, la République a cité à l'Ordre de l'Armée l'École de Santé Navale à trois reprises:
De plus, en 2004, en souvenir du dévouement et du sacrifice des élèves durant le conflit algérien, le drapeau reçoit l'inscription « AFN 1952-1962 »[5]. Près de 300 Navalais ont donné leur vie pour la France, tués à l'ennemi, décédés des suites de leurs blessures ou victimes du devoir. PromotionsPromotions de l'École Principale du Service de Santé de la Marine et des ColoniesListe des promotions de l'École Principale du Service de Santé de la Marine et des Colonies
Promotions de l'École du Service de Santé des Armées de BordeauxListe des promotions de l'École du Service de Santé des Armées de Bordeaux
Grands anciensL'École de Santé Navale a vu éclore en son sein de nombreux talents exceptionnels. Parmi eux, certains ont marqué de manière durable l'Histoire de la Médecine française, voire l'Histoire tout court.
Directeurs et commandants de l'écoleDirecteurs de l'École principale du Service de Santé de la MarineListe des directeurs de l'École principale du Service de Santé de la Marine
Directeurs de l'École principale du Service de Santé de la Marine et des ColoniesListe des directeurs de l'École principale du Service de Santé de la Marine et des Colonies
Commandants de l'École du Service de Santé des Armées de BordeauxListe des commandants de l'École du Service de Santé des Armées de Bordeaux
Notes et références
Articles connexes
Liens externes |