Lunar Reconnaissance Orbiter
Vue d'artiste de LRO.
Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO) est une sonde spatiale de type orbiteur de la NASA lancée en 2009 dont l'objectif est d'étudier la Lune depuis son orbite. LRO fait partie du programme Lunar Precursor Robotic dont l'objectif est d'effectuer des reconnaissances approfondies de notre satellite notamment pour préparer les missions habitées du programme Constellation d'exploration lunaire annulé le par le président Obama. LRO, dont la masse totale est de 1 916 kg, embarque sept instruments scientifiques notamment des caméras en lumière visible, un radiomètre infrarouge, un spectromètre ultraviolet et différents instruments destinés à détecter la présence d'eau. LRO est placée sur une orbite particulièrement basse de 50 km autour de la Lune qui lui permet d'effectuer des observations extrêmement détaillées de la surface. Le système de télécommunication est dimensionné pour transférer le très grand volume de données qui en découle. Les objectifs de la sonde sont de dresser une carte à haute résolution de la Lune, tenter de détecter la présence d'eau au niveau des régions polaires, définir un système géodésique complet et évaluer l'intensité du rayonnement ionisant d'origine cosmique. LRO est lancée le par un lanceur Atlas V depuis la base de lancement de Cap Canaveral, avec une deuxième sonde lunaire Lunar Crater Observation and Sensing Satellite (LCROSS) ayant une mission complémentaire. Les instruments de la sonde permettent de dresser une carte topographique (avec le relief) et une carte bidimensionnelle de la Lune d'une précision inégalée. La mission, d'une durée initiale d'un an, est prolongée à plusieurs reprises. ContexteMission de reconnaissance pour le programme ConstellationLorsque le projet de la sonde LRO est mis au point, la NASA prévoit d'envoyer des astronautes sur la Lune vers 2020 dans le cadre de son programme Constellation : celui-ci constitue la concrétisation de la stratégie spatiale américaine à long terme définie par le président George W. Bush en , énoncé dans le document Vision for Space Exploration. Le programme Constellation a pour objectif l’envoi d’astronautes sur la Lune vers 2020 pour des missions de longue durée (7 jours au lieu de 3 pour le programme Apollo). On envisage des sites d'atterrissage dans les régions polaires éclairées pratiquement en permanence pour bénéficier à la fois d'un ensoleillement plus important, donc de nuits plus courtes et de températures moins extrêmes. Il est également envisagé dans une perspective plus lointaine d'exploiter les dépôts de glace d'eau qui existent peut-être sous ces latitudes dans les zones en permanence à l'ombre. LRO constitue avec son compagnon LCROSS la première mission préparatoire de ce projet. Ces deux engins spatiaux font partie du programme Lunar Precursor Robotic qui regroupe plusieurs missions de sondes spatiales qui doivent être lancées vers la Lune pour préparer les futurs vols habités. En 2010, le programme Constellation est annulé pour des raisons financières. Objectifs de la missionLes principaux objectifs de la mission sont[2] :
Déroulement de la missionLancement et injection en orbite lunaireLa fenêtre de lancement est choisie de manière que le plan orbital de la sonde autour de la Lune qui en résulte coïncide avec l'azimut du Soleil au moment des solstices lunaires. En effet, l'un des objectifs de LRO est d'identifier les zones polaires situées en permanence à l'ombre ou au contraire éclairées en permanence. Lorsque le plan orbital coïncide avec l'orientation du Soleil durant les solstices lunaires, la sonde peut déterminer les conditions les plus extrêmes d'ensoleillement rencontrées par les régions polaires[3]. LRO est injectée sur une orbite de transfert vers la Lune par un lanceur Atlas V de type 401. Le lanceur emporte également la sonde LCROSS dont la mission est de tenter de détecter la présence d'eau à l'intérieur des cratères situés dans les zones polaires de la Lune. Après quatre jours de navigation et une seule correction de trajectoire à mi-course (28 m/s), la sonde LRO utilise ses propulseurs à quatre reprises avec un Delta-v de respectivement 567 m/s, 185 m/s, 133 m/s et 41 m/s pour se placer sur une orbite elliptique de 30 × 216 km. La sonde reste sur cette orbite durant 60 jours pendant lesquels les instruments scientifiques sont activés et calibrés (phase de recette). Une dernière impulsion place la sonde sur son orbite de travail de type polaire circulaire à une altitude de 51 km au-dessus du sol lunaire. Cette orbite particulièrement basse est retenue pour permettre une étude très détaillée du sol lunaire[4],[5]. Déroulement des opérationsÀ l'issue de la phase de recette de 60 jours, la sonde entame les opérations de recueil des données scientifiques. Il est prévu que l'ensemble des objectifs soient atteints environ un an après la date de lancement. Chaque jour la sonde transmet environ 460 gigaoctets de données (90 % sont générées par les caméras en lumière visible). Celles-ci sont transmises en bande Ka avec un débit de 100 millions de bits par seconde à la seule station de réception terrestre de White Sands qui est en visibilité depuis LRO de 2 à 6 fois par jour durant 45 minutes[6]. Du fait des mouvements relatifs de la Terre, du Soleil et de la Lune, la Terre est visible de la sonde de manière continue durant deux jours deux fois par mois et le Soleil de manière continue durant un mois deux fois par an. Au moment des solstices lunaires (deux fois par an), la sonde effectue un mouvement de rotation de 180° pour pouvoir présenter la face efficace de son panneau solaire au Soleil. Sur son orbite, la sonde alterne période éclairée et période à l'ombre, chacune d'une durée de 56 minutes en moyenne. Toutefois, sur la durée de sa mission, la sonde connaît plusieurs périodes d'éclipse totale ou partielle de plusieurs heures liées à l'interposition de la Terre entre la Lune et le Soleil. La plus sévère se situe le (éclipse totale de 1 h 41 min et partielle de 3 h 40 min) durant laquelle les accumulateurs doivent subir une décharge de 90 %[7]. Du fait du champ de gravité irrégulier de la Lune, l'excentricité de l'orbite est progressivement modifiée et au bout de 60 jours la sonde risque de heurter la surface de la Lune. LRO consacre la première année un Delta-v de 150 m/s pour maintenir son orbite[8]. Les corrections d'orbite sont effectuées une fois toutes les quatre semaines tandis que la désaturation des roues de réaction est réalisée toutes les deux semaines[6]. La sonde dispose d'une marge de carburant suffisante (Delta-v de 65 m/s) pour lui permettre d'être prolongée au moins de trois ans sur une orbite de 30 × 216 km. Peu après la fin de la mission et l'épuisement de son carburant, la sonde ne pouvant plus corriger son orbite, doit percuter le sol lunaire[9]. Principales caractéristiques de la sondeLa sonde lunaire LRO pèse 1 916 kg dont 898 kg de carburant permettant de fournir un Delta-v de 1 270 m/s. Elle est alimentée en énergie par un panneau solaire orientable qui lui fournit 685 watts stockés dans des accumulateurs lithium-ion. Une fois le panneau solaire déployé, le satellite a une envergure de 4,30 m sur 3,25 m, sans tenir compte de l'antenne à grand gain déployée au bout d'un mât qui accroît l'envergure de 2,59 mètres. Les données recueillies sont transmises au centre de contrôle en bande Ka (grand débit) ou en bande S avec un débit qui peut atteindre 100 Mo par seconde. Le volume total par jour peut atteindre 461 Go[10]. Les opérations de cartographie génèrent entre 70 et 100 téraoctets d'images. La sonde dispose de 4 moteurs-fusées de 80 newtons de poussée utilisés pour les manœuvres d'insertion en orbite et baptisés en conséquence IT (insertion thrusters). Ces propulseurs se présentent en deux groupes de 2. Un seul des deux groupes est suffisant pour permettre la manœuvre exigeant le plus de poussée durant l'insertion en orbite. Par ailleurs, 8 moteurs-fusées de 20 newtons de poussée sont utilisés pour les corrections fines d'orbite ainsi que pour le contrôle d'attitude. Ils sont de ce fait baptisés AT (attitude thrusters). La sonde est stabilisée sur 3 axes, c'est-à-dire que son orientation est fixe dans un référentiel stellaire. Le contrôle d'attitude est réalisé à l'aide de deux viseurs d'étoiles, d'une centrale à inertie et de 4 roues de réaction. En cas de perte de contrôle, dix capteurs solaires prennent le relais en « mode de survie » pour fournir une orientation de référence approchée[11]. Les instruments scientifiquesLa sonde emporte six instruments scientifiques et un démonstrateur technologique[12] :
Développement de la sonde spatiale et déroulement de la missionLa validation préliminaire de la conception (Preliminary design review - PDR) de la sonde développée par le Goddard Space Flight Center est réalisée en février 2006 et la conception définitive (Critical Design Review - CDR) est validée en [20]. La sonde est lancée le à 21 h 32 TU par un lanceur Atlas V depuis la base de lancement de Cap Canaveral. En , la mission initiale s'achève. La NASA décide de la prolonger en conservant la même orbite[21]. En , l'équipe chargée de la mission désactive le radar Mini-RF, qui a rempli ses objectifs en effectuant plus de 400 relevés mais à la suite d'une défaillance ne produit plus de résultats exploitables[22]. Résultats scientifiquesLa sonde renvoie ses premières images haute résolution de la surface lunaire le [23]. Ces clichés très prometteurs couvrent une région située à l'est du cratère d'impact Hell E, au sud de la mer des Nuées. En , les données thermiques recueillies par le DLRE (Diviner Lunar Radiometer Experiment), viennent confirmer la présence de zones extrêmement froides situées en permanence à l'ombre au pôle sud de la Lune. Des températures allant jusqu'à - 248 °C sont mesurées par l'instrument. Il s'agit de l'une des températures les plus basses enregistrées jusque-là dans le Système solaire, inférieure à celle de la surface de Pluton[24]. Les instruments optiques de LRO fournissent des images détaillées des sites des missions lunaires du programme Apollo et les déplacements des astronautes à la surface de la Lune sont repérés sur les photos prises. Ces informations permettent, entre autres, de fournir le contexte géologique des échantillons de sol lunaire ramenés sur Terre[25]. LRO parvient également à localiser et photographier la sonde soviétique Lunokhod 1 dont le rétroréflecteur laser se révèle parfaitement fonctionnel lors d'un test effectué depuis les États-Unis[26]. LRO joue un rôle vital dans la mission jumelle LCROSS en fournissant à l'aide de ses instruments la topographie de la région dans laquelle LCROSS doit s'écraser pour remplir ses objectifs, c'est-à-dire les régions susceptibles d'abriter de l'eau compte tenu de leur température et de l'abondance en hydrogène[27]. Le spectrographe ultraviolet lointain LAMP (Lyman Alpha Mapping Project) embarqué à bord de l'orbiteur lunaire semble indiquer la présence de 1 à 2% de glace d'eau en surface au fond des cratères d'impact alors que les scientifiques s'attendaient à ce que celle-ci, du fait du bombardement du vent solaire, ne se conserve que sous la surface. Par ailleurs la porosité du sol atteint 70% contre 40% dans les régions éclairées[28].
LRO permet de dresser trois cartes topographiques dont le niveau de détail est sans commune mesure avec les cartes existantes. Ces trois cartes définissent les contours des reliefs de la Lune, les pentes et enfin la rugosité de la surface. Les parties relatives à la face cachée de la Lune, méconnue, mettent clairement en évidence que notre satellite a subi un bombardement particulièrement violent reflété par la présence du cratère bassin Pôle Sud-Aitken qui constitue le plus grand cratère d'impact connu du Système solaire[29]. Les images prises par LRO d'escarpements relativement récents déjà observés à l'époque du programme Apollo semblent confirmer que la Lune continue à se contracter du fait du refroidissement de son cœur[30]. Le relevé topographique détaillé et systématique de la surface de la Lune effectué pour la première fois grâce à l'instrument LOLA met en évidence que la taille des astéroïdes qui ont frappé par le passé les planètes du Système solaire diminue de manière significative il y a environ 3,8 milliards d'années. Le radiomètre Diviner détecte par ailleurs une géologie beaucoup plus diversifiée que ce qui est connu avec des compositions de roches ne se limitant pas à l'opposition mers lunaires / hauts plateaux. Ces découvertes ouvrent la voie à une genèse géologique de la surface de la Lune beaucoup plus complexe que celle envisagée jusque-là[31].
Notes et références
Documents de référence
AnnexesArticles connexes
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